Les électeurs ivoiriens votaient dans le calme dimanche pour une élection présidentielle cruciale que le président sortant Alassane Ouattara espère gagner dès le premier tour face à une opposition divisée.
Une présidentielle apaisée et crédible dans ce pays, premier producteur mondial de cacao et poids lourd économique d'Afrique de l'Ouest, est jugée fondamentale pour tourner définitivement la page des violences meurtrières qui avaient suivi la victoire en 2010 d'Alassane Ouattara sur son prédécesseur Laurent Gbagbo.
Mais la peur des violences est toujours vivace parmi les 23 millions d'habitants.
"Je veux que la paix s'installe définitivement et du travail pour mes enfants", a affirmé Bintou Coulibaly, une commerçante qui a voté à Adjamé, quartier populaire d'Abidjan.
Un peu plus de 6 millions de personnes sont inscrites sur les listes électorales (le pays comptant beaucoup d'immigrés qui n'ont pas le droit de vote).
Des retards de une ou deux heures pour l'ouverture des bureaux de vote ont été fréquents à Abidjan ou à Gagnoa (270 km au nord-ouest d'Abidjan) alors qu'à Bouaké (centre du pays) un bureau n'a ouvert qu'à midi, soit cinq heures après l'heure légale.
"Ca ressemble à un sabotage. Certains électeurs sont même repartis", s'est insurgé un électeur, Karim Konaté.
Selon des observateurs, le taux d'abstention risque d'être élevé alors qu'au précédent scrutin de 2010, la participation avait frôlé les 80%. La commission électorale indépendante avait prorogé de trois jours la date limite de retrait des cartes d'électeur et le gouvernement a lancé des campagnes pour inciter les gens à voter.
"L'engouement que nous constatons sur l'ensemble du territoire nous fait penser que le taux de participation sera très bon", a toutefois déclaré le président Ouattara, après avoir déposé son bulletin dans l'urne à Cocody, un quartier d'Abidjan.
"Nous devons faire en sorte de sortir de ces élections avec la paix, la sérénité et nous rassembler davantage pour faire face aux autres défis qui attendent la nation ivoirienne", a-t-il poursuivi.
De nombreux opposants et observateurs reprochent au régime Ouattara d'avoir appliqué "une justice des vainqueurs" depuis cinq ans en condamnant presque uniquement des partisans du camp Gbagbo, et d'avoir échoué à véritablement pacifier la Côte d'Ivoire.
Au passage du chef de l'Etat, ses partisans criaient "KO! KO! KO!", en référence à la volonté affichée du camp présidentiel de l'emporter dès le premier tour avec le slogan "un coup KO".
- problèmes avec la tablette anti-fraude -
A la tête d'une coalition comprenant son parti mais aussi le Parti démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI), créé par le "père fondateur" du pays Félix Houphouet-Boigny, M. Ouattara s'appuie sur une impressionnante machine de campagne électorale et met en avant son bilan économique.
Grand absent du scrutin, l'ex-président Laurent Gbagbo attend son jugement pour crimes contre l'humanité par la Cour pénale internationale dans une cellule à La Haye (Pays-Bas). En 2010, son refus de reconnaître la victoire de M. Ouattara avait plongé le pays dans cinq mois de conflit qui s'étaient soldés par la mort de 3.000 personnes, épilogue sanglant d'une décennie de crise politico-militaire.
Parmi les six adversaires de Ouattara, Pascal Affi N'Guessan, le président du Front populaire ivoirien (FPI) fondé par M. Gbagbo, paraît le plus à même de le pousser à un deuxième tour. Ce scrutin est très important pour lui car une partie du FPI boycotte l'élection par fidélité à l'ancien président.
Trois autres candidats, l'ex-ministre des Affaires étrangères Amara Essy, l'ex-président de l'Assemblée nationale Mamadou Koulibaly et l'ancien Premier ministre Charles Konan Banny, se sont retirés de la course pour, selon les termes de M. Essy, "ne pas se rendre complice d'une mascarade électorale".
Si le pouvoir et des observateurs ont attribué ces retraits à la crainte de "prendre une veste", Amnesty International a appelé la Côte d'Ivoire à "mettre fin aux arrestations arbitraires d'opposants", qui "créent un climat de peur qui compromet l'exercice de la liberté d'expression".
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