Des documents déclassifiés publiés vendredi jettent un éclairage inédit sur les loupés du renseignement britannique dans le scandale du "Cambridge Five", ce réseau d'agents soviétiques qui opérait en Grande-Bretagne dans les années 1940.
Ces agents avaient été recrutés par l'URSS dans les années 1930 à l'Université de Cambridge, et occupaient différents postes aux services de renseignements intérieurs (MI5) et extérieurs (MI6) britanniques notamment.
Les documents publiés vendredi reviennent notamment sur le départ en 1951 de deux d'entre eux vers la Russie, Guy Burgess et Donald Maclean, au moment où ce dernier était sur le point d'être interrogé par les services secrets de Sa Majesté.
Si les autorités britanniques nourrissaient des soupçons à son égard, Burgess n'attirait en revanche guère l'attention du contre-espionnage, sans doute à cause de son comportement erratique.
"Burgess était indiscipliné et irresponsable à un niveau tel qu'il était difficilement concevable qu'il pût être impliqué dans une activité clandestine", souligne un ancien collègue, qui le décrit comme un "alcoolique invétéré" doublé d'un "pervers", en référence à son homosexualité.
L'agent du MI5 chargé de suivre Maclean évoque lui un homme "très inquiet", et également très porté sur la bouteille.
- Gin et cætera -
"Il commandait un grand verre de gin, sa boisson préférée, arpentait le bar pendant quelques secondes, buvait cul sec, partait, en commandait un autre et recommençait", indique une note déclassifiée.
La défection des deux hommes, six ans après la fin de la Deuxième Guerre mondiale, avait fait scandale en Grande-Bretagne, sur fond de tensions avec le régime de Staline, et déclenché l'ouverture immédiate d'une enquête des services secrets.
Selon un document du MI5, de "sérieux" soupçons pesaient à l'époque sur un autre membre du "Cambridge Five", Kim Philby, agent du MI6.
Alors que le MI5 souhaite l'interroger, le MI6 refuse. L'agent double démissionne en juillet 1951, se voit lavé de toute soupçon en 1955 avant de rejoindre finalement l'Union soviétique en 1963.
Burgess et Maclean quittent eux le pays le 25 mai 1951, après avoir dîné chez Maclean en compagnie de son épouse Melinda, enceinte. Les deux hommes prennent, de nuit, un bateau reliant Southampton (sud de l'Angleterre) à Saint-Malo (ouest de la France).
"J'ai dû partir précipitamment", écrit Maclean dans un télégramme qu'il aurait adressé à sa femme. "Je vais bien. Ne t'inquiète pas ma chérie. Je t'aime. Je t'en prie, continue à m'aimer. Donald".
Arrivé en Russie, les deux hommes connaissent des fortunes diverses. Maclean travaille, il est rejoint par sa famille. Burgess en revanche semble s'acclimater plus difficilement à sa nouvelle patrie. Sa mère malade lui manque et il se fait livrer depuis Londres costumes et livres de Charles Dickens.
Dans les premières lettres qu'il écrit à sa mère, l'espion se vante certes de manger tellement de caviar et de saumon fumé qu'il en "devient gros". Mais le ton change en 1959, un rapport le décrivant comme quelqu'un de "pathétique". "Il buvait beaucoup () et était très amoureux d'un moine du monastère du coin".
- 'Confiance totale' -
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