La direction d'Air France a confirmé jeudi vouloir supprimer un millier d'emplois en 2016 par des départs volontaires, durant un comité central d'entreprise "confus", selon les syndicats, au moment où plusieurs milliers de salariés manifestaient.
"Les seuls départs que nous envisageons pour 2016, ce sont des départs volontaires et pour 1.000 postes", a déclaré le PDG d'Air France Frédéric Gagey à la presse.
Mais la direction est "incapable de dire dans quels secteurs ils seront supprimés", a immédiatement regretté Didier Fauverte, secrétaire (CGT) du CCE.
Direction et syndicats ont échoué à s'entendre sur le plan de développement "Perform 2020", qui prévoit de faire voler le personnel une centaine d'heures de plus par an, à salaire égal. Le 5 octobre, la compagnie a présenté un plan de "restructuration" menaçant 2.900 postes en 2016 et 2017.
L'annonce a été suivie par l'agression de deux dirigeants, obligés de fuir des manifestants, chemises en lambeaux. Cinq salariés seront jugés le 2 décembre pour violence. La direction les a mis à pied, sans salaire.
Air France a depuis fait savoir qu'il était possible "d'éviter" la deuxième phase du plan, la plus douloureuse.
Les 1.900 postes menacés en 2017 sont "suspendus au fait de trouver des accords avec les pilotes et les personnels au sol pour gagner en productivité", selon M. Fauverte.
Pendant la tenue du CCE, dans un hôtel particulier du XVIe arrondissement, plusieurs milliers de personnes étaient rassemblées à Paris et des centaines en région pour le maintien de l'emploi et en soutien "aux inculpés".
"On a une entreprise qui va renouer avec les bénéfices (en 2015) et qui poursuit un plan de diminution d'emplois", a lancé Alexandre, un pilote du syndicat Spaf venu manifester en uniforme aux abords de l'Assemblée nationale.
"Les salariés sont excédés, () ils ont subi des plans successifs depuis des années et ne voient pas le bout du tunnel", a-t-il développé parmi les pétards, sifflets et fumigènes.
Sous le précédent plan de restructuration, entre début 2012 et fin 2014, les effectifs de la compagnie Air France (52.500 salariés en début d'année) ont baissé de 5.500 postes, par des départs volontaires. Des pertes de jours de repos et un gel des salaires ont également été consentis.
"Arrêt des poursuites disciplinaires et judiciaires, nous ne sommes pas des voyous" proclamait la banderole de l'intersyndicale, à l'origine du rassemblement parisien qui a réuni "au moins 7.000" personnes selon la CGT.
- 'Mission impossible' -
Plus tôt, les élus du personnel avaient regretté le "flou artistique" entretenu par la direction en CCE.
"Une grosse impression de confusion", avait commenté Véronique Damon, du syndicat de pilotes SNPL. "Aucun détail sur les 1.000 emplois", a renchéri Gilles Rivet (FO).
A l'entame de la séance, les syndicats ont voté "à l'unanimité" le déclenchement d'un droit d'alerte, missionnant un cabinet d'experts pour interroger Air France "sur la stratégie, le plan de développement et l'emploi", selon Miguel Fortea (CGT).
Ne procéder qu'à des départs volontaires, avec les économies réclamées, "c'est mission impossible", a dit le syndicaliste. La direction "fixe des objectifs complètement inatteignables, notamment sur les escales de Marseille et sur Orly", abonde Jérôme Beaurain (SUD).
La réduction de 10% de l'offre long courrier sur 2016 et 2017, menace brandie par la direction en cas d'échec des négociations, "ça nous paraît aberrant et totalement inquiétant" au moment où le marché est "en croissance", s'alarme Véronique Damon (SNPL).
L'ensemble des syndicats appelle l'Etat, actionnaire à plus de 17%, à se saisir du dossier. Ils lui reprochent l'augmentation récente des redevances aéroportuaires, au détriment d'Air France, et l'octroi de droits de trafic en région aux compagnies concurrentes, notamment du Golfe.
"La nécessité d'un État stratège, d'un État régulateur, c'est ce que nous portons en tant que parlementaires", a déclaré jeudi le député (PS) de Seine-Saint-Denis Daniel Goldberg, à l'origine d'une rencontre avec l'intersyndicale.
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