L'Assemblée nationale a rejeté jeudi toute hausse des prix du tabac, défendue par des députés de gauche, suivant ainsi la volonté du gouvernement qui ne veut pas mettre en péril sa "mesure phare" du paquet neutre, déjà combattue par les buralistes.
Près de 60 députés socialistes et écologistes s'étaient associés à des amendements de Michèle Delaunay (PS), rapporteure du volet sur l'assurance maladie dans le projet de budget de la Sécu, pour augmenter "fortement" les prix: de 30% pour le tabac à rouler et de 1 euro pour le paquet avec "une arrivée vers les 10 euros" d'ici environ 3 ans.
Mais, après des débats finalement moins ardents qu'attendu, l'Assemblée les a rejetés, répondant au voeu du gouvernement pour qui il faut privilégier le paquet neutre (sans logo).
"Personne ne dit qu'il est contre la réduction du tabagisme", s'est défendue la ministre de la Santé Marisol Touraine dans l'hémicycle, rappelant que le tabac fait 78.000 morts par an.
Mais "devons-nous disperser nos efforts?", s'est-elle interrogée, vantant la "cohérence de la politique portée" avec le plan anti-tabac, qui prévoit notamment la mise en place du paquet neutre, dans le cadre du projet de loi Santé.
Le chef de file des députés socialistes Bruno Le Roux s'est lui aussi dit favorable à une hausse des prix à l'avenir, mais a demandé "au nom du groupe que nous ne le fassions pas de façon concomitante avec le paquet neutre". Pour lui, opter pour une hausse et devoir ensuite revenir sur le paquet neutre serait un "marché de dupes".
- 54 jours de silence -
Farouche combattante du tabagisme, Mme Delaunay, cancérologue de profession, a défendu avec vigueur ses amendements, arguant que la hausse des prix est la "mesure la plus efficace dans la réduction du tabagisme".
Elle avait regretté dans la matinée sur LCP "un certain manque de courage" de politiques sur le sujet et a fait remarquer aux députés que "si nous observions une minute du silence pour chaque victime du tabac, nous nous tairions pendant 54 jours".
L'un des rares à la soutenir dans l'hémicycle, l'écologiste Jean-Louis Roumegas, a prévenu que ce n'était "pas une bonne idée d'échelonner les mesures", arguant que c'est "cet effet de masse qui permet d'avoir un effet significatif sur la consommation".
La combativité des députés a pu être amoindrie par l'intervention matinale du ministre des Finances, Michel Sapin, qui avait clairement fermé la porte à toute hausse.
"Le gouvernement ne prévoit pas d'augmentation des taxes sur le tabac", avait-il ainsi déclaré, excluant de "taper sur les deux tableaux en même temps" avec le paquet neutre, position aussi affichée mardi devant les députés par Mme Touraine.
La dernière hausse du prix des cigarettes remonte à janvier 2014, portant le prix du paquet le moins cher à 6,50 euros, et celui du plus cher, pour la marque la plus vendue (Marlboro), à 7 euros.
Pour le président de la Confédération des buralistes, Pascal Montredon, la stabilité annoncée des prix est "la moindre des choses". Il a à nouveau fustigé jeudi le paquet neutre "qui va fragiliser encore un peu plus nos petites entreprises" et causer la faillite de "1.200 bureaux de tabac" d'ici la fin d'année.
Les buralistes prévoient une journée d'action nationale le 2 novembre contre cette mesure.
Dans l'hémicycle, ils ont reçu le soutien de la droite, Bernard Accoyer (Les Républicains) dénonçant à nouveau cette mesure, qui risque, a-t-il dit, d'alimenter la contrebande.
Mais sur le paquet neutre, la ligne du gouvernement est de tenir, même si certains poids lourds, inquiets de la mobilisation des buralistes, sont quelque peu réticents.
Mi-septembre, le Sénat, à majorité de droite, avait supprimé le dispositif du projet de loi santé, contre l'avis du gouvernement, mais Mme Touraine a assuré qu'il serait rétabli en nouvelle lecture à l'Assemblée.
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