Des "faits d'une gravité extrême" et "un comportement déplorable": le tribunal correctionnel de Nanterre a eu des mots très durs jeudi pour le sénateur socialiste Philippe Kaltenbach, qu'il a condamné pour corruption passive à deux ans de prison dont un ferme, au-delà des demandes du parquet.
L'ancien maire de Clamart a été reconnu coupable d'avoir accepté de l'argent liquide de la part d'un de ses adjoints, contre une promesse d'attribution de logement social. Il a également été condamné à une inéligibilité de 5 ans et 20.000 euros d'amende.
L'élu, qui nie les faits, a indiqué qu'il allait interjeter appel. "Je suis victime d?un coup monté visant à me salir et à m?éliminer politiquement. Je n?ai jamais touché d?argent en échange d?un quelconque avantage ou d?un appartement", a-t-il affirmé sur son blog après le rendu de la décision, alors qu'il était absent de l'audience.
La condamnation est plus sévère que les réquisitions du procureur, qui avait demandé, lors de l'audience du 22 septembre, une peine d'emprisonnement intégralement assortie du sursis.
L'affaire était née d'une vidéo, tournée en 2010 à l'insu de Philippe Kaltenbach par son adjoint de l'époque, Mohamed Abdelouahed, et diffusée sur internet en 2012.
Dans une séquence, on voit l'ancien maire de Clamart recevoir, dans son bureau, une somme d'argent en liquide de M. Abdelouahed. Pendant la remise de fonds, les deux hommes discutent de ce qui semble être l'attribution d'un logement à un tiers.
Selon le maire de l'époque, il s'agissait d'un "remboursement de prêt" à son adjoint. Mais, a souligné la présidente du tribunal, Isabelle Prévost-Desprez, lors de la lecture de la décision, "aucune allusion à ce prêt n'est audible dans la vidéo" et "aucun argument ne rend ce prêt objectif".
-'Pas une première'-
Philippe Kaltenbach a par ailleurs toujours estimé qu'il était victime d'un complot ourdi par son adversaire politique de toujours, le maire (Les Républicains) de la commune voisine du Plessis-Robinson, Philippe Pemezec: une thèse que les faits "accréditent", a convenu le tribunal, "mais pas susceptible" de dédouaner pour autant l'élu socialiste.
Car le sénateur a par ailleurs livré "des explications maladroites et mensongères" pour justifier "un comportement déplorable, plus occupé par son seul intérêt électoral qu'à l'intérêt général", ont fustigé les magistrats, en pointant "la gravité extrême des faits".
"A l'évidence", a ajouté Isabelle Prévost-Desprez, il ne s'agissait "pas d'un événement exceptionnel et unique", "cette situation ne semblait pas être une première, ni pour l'un, ni pour l'autre".
Mohammed Abdelouahed a pour sa part été condamné, pour corruption active, à deux ans d'emprisonnement avec sursis ainsi qu'à une interdiction de vote et d'éligibilité pendant trois ans.
Après avoir tourné la vidéo, l'ancien adjoint avait transmis les bandes non pas à la police, mais au maire du Plessis-Robinson, via des intermédiaires.
Philippe Pemezec avait ensuite alerté le parquet de Nanterre, à l'époque dirigé par le procureur Philippe Courroye, convaincu de l'opportunité d'engager des poursuites.
Mohamed Abdelouahed avait expliqué que "les rumeurs de corruption qui traînaient à Clamart" l'avaient poussé à "faire un film pour les vérifier", quitte à prélever dans son bas de laine personnel 6.000 euros afin de démontrer le délit, malgré des revenus déclarés fort modestes.
Or, le tribunal constate "que votre affirmation n'est jamais crédible" et qu'il "existe un doute sur l'origine des fonds qui ne peuvent provenir que de celui ou ceux qui ont voulu piéger" M. Kaltenbach, a considéré la présidente Prévost-Desprez.
Les avocats de M. Abdelouahed, "déçus par les motivations du tribunal", ont toutefois indiqué à l'AFP qu'ils n'entendaient pas contester la décision.
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