Le président François Hollande a plaidé mardi pour l'égalité des chances et la création d'entreprises dans les quartiers "fragiles", lors d'un déplacement chahuté à la Courneuve, dix ans après les émeutes dans les banlieues.
"Il n'y a pas de quartier perdu dans la République. Il n'y a pas une France périphérique", a déclaré le président lors d'un discours dans une pépinière d'entreprises implantée dans la cité des 4.000 pour lancer l'Agence nationale de développement économique, baptisée "France Entrepreneur".
Affirmant que son rôle était d'assurer "l'égalité", le président a jugé qu'"on ne peut avoir une France qui serait disparate, un puzzle" face au développement économique.
Cette agence, annoncée en février dans la foulée des attentats de Paris qui ont focalisé l'attention sur les banlieues, vise à "multiplier par quatre" les créations d'entreprises venant de quartiers "fragiles" pour atteindre 20% des créations d'entreprises contre 5% aujourd'hui, a indiqué le président.
S'appuyant sur des organismes professionnels comme les chambres de commerce, elle accompagnera le créateur dans une démarche d'embauches. "D'ici 2017, 10.000 entrepreneurs seront identifiés et appuyés pour leur premier recrutement", selon le président.
François Hollande, accueilli à son arrivée par des sifflets nourris et quelques applaudissements, a souligné être venu mardi "dix ans presque jour pour jour après la tragédie de Clichy, un drame qui avait profondément bouleversé notre pays et qui avait obligé le gouvernement de l'époque à décréter l'état d'urgence".
"C'est une toute autre image aujourd'hui qu'il faut donner. Ce que nous devons démontrer c'est qu'il y a des talents, des entrepreneurs, des créateurs, des jeunes qui veulent tout simplement réussir", a-t-il plaidé.
Interrogé sur les huées à son arrivée, le président a répondu à la presse en marge de son déplacement : "J'ai entendu aussi des applaudissements. Ce qu'il faut combattre, c'est la déception".
"Plus qu'une image désolante pour la fonction qu'il serait censé incarner, cette arrivée sous les huées est la marque indélébile du mensonge de la campagne de 2012 qu'il incarne, en particulier dans les quartiers populaires", a réagi Bruno Beschizza, secrétaire national Les Républicains.
- "La même France" -
"Veut-on la même France ou doit-on être séparé, (être) pour les uns pour les autres des suspects parce qu'on ne serait pas du bon quartier, de la bonne couleur de peau ? C'est un enjeu considérable", a estimé le chef de l'Etat.
Depuis le début de son mandat, François Hollande s'est rendu une trentaine de fois dans les banlieues (dont une dizaine en Seine-Saint-Denis), qui avaient voté majoritairement pour lui en 2012 face au candidat de droite Nicolas Sarkozy. C'est en revanche sa première visite à La Courneuve.
Les émeutes à l'automne 2005 pour dénoncer des conditions de vie à la marge du développement économique et des perspectives d'emplois s'étaient produites quelques mois après la venue à la cité des 4.000 de Nicolas Sarkozy, qui avait promis de nettoyer "la racaille" au "kärcher" au lendemain du décès d'un enfant de 11 ans, tué par une balle perdue lors d'une rixe entre gangs.
Cette expression émanant du ministre de l'Intérieur d'alors avait provoqué la colère des habitants et suscité une vive polémique au sein de la classe politique.
Réagissant à cette promesse de "nettoyage au kärcher", le député des Yvelines Henri Guaino (Les Républicains) a estimé mardi que "la question est de savoir si on lui reproche de ne pas l'avoir fait ou si on lui reproche d'avoir prononcé le mot, parce que la réalité, c'est que la vie dans certains quartiers est invivable pour les habitants".
Selon le président du Conseil départemental de Seine-Saint-Denis, Stéphane Troussel (PS), la visite de François Hollande "fait du bien aux habitants des quartiers populaires, car le climat, le discours ambiant d'un certain nombre de responsables politiques, est insupportable". "Il faut arrêter de culpabiliser les banlieues. Nous sommes la France", a-t-il dit à l'AFP avant l'arrivée du président.
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