Jugée pour avoir comparé il y a cinq ans les prières de rue de musulmans à l'Occupation nazie, Marine Le Pen a assuré mardi n'avoir commis "aucune infraction" et a affirmé être dans son rôle en évoquant cette question.
A son arrivée vers 13H30 devant le Palais de Justice de Lyon, où l'attendait une meute de journalistes, la présidente du FN a accusé le pouvoir socialiste d'être derrière sa comparution: "il ne vous étonne pas ce calendrier ? Nous sommes à un mois d'une élection régionale alors que cette affaire a cinq ans !".
L'affaire remonte à décembre 2010. Marine Le Pen est alors en campagne pour la présidence du Front national face au Lyonnais Bruno Gollnisch. Elle assiste à une réunion publique de militants du parti à la salle du pavillon du parc de la Tête d'Or.
"Je suis désolée mais pour ceux qui aiment beaucoup parler de la Seconde Guerre mondiale, s'il s'agit de parler d'Occupation, on pourrait en parler, pour le coup, parce que ça c'est une occupation du territoire", avait déclaré Mme Le Pen sous les applaudissements.
Et d'ajouter: "C'est une occupation de pans du territoire, des quartiers, dans lesquels la loi religieuse s'applique, c'est une occupation. Certes, il n'y a pas de blindés, pas de soldats, mais c'est une occupation tout de même et elle pèse sur les habitants".
Une provocation verbale, rare chez elle, qui lui vaut sa première convocation à la barre pour "provocation à la discrimination, à la violence ou à la haine envers un groupe de personnes à raison de leur appartenance à une religion".
Son père, tribun sulfureux de 87 ans, est lui coutumier du fait. C'est d'ailleurs pour cela qu'il a été exclu cet été du parti qu'il a cofondé, après une série de nouvelles déclarations sur la Shoah jugées pénalisantes pour la stratégie de "dédiabolisation".
- Avec un petit "o" -
Tailleur noir et chemisier gris, Mme Le Pen était convoquée devant la 6e chambre, celle de la presse, du tribunal de grande instance de Lyon, prise d'assaut pour l'occasion. Le chef de file du FN pour les régionales en Auvergne-Rhône-Alpes Christophe Boudot s'est assis à ses côtés.
L'audience est présidée par le juge Gérard Gaucher, qui s'était illustré il y a deux ans en déplaçant de manière exceptionnelle une audience dans un campement insalubre de Roms, pour mieux juger une expulsion.
Sur le fond, la présidente du parti d'extrême droite a déjà laissé entendre sa ligne de défense: elle parlait d'"occupation" qu'avec un petit "o" sans faire référence à la Seconde Guerre mondiale.
L'avocat de la prévenue, David Dassa Le Deist, a indiqué à la presse vouloir "démontrer que ce terme n'a aucune connotation infractionnelle".
- Persiste et signe -
Mais Mme Le Pen a aussi évoqué devant les caméras les propos qui lui valent cette première judiciaire.
"Les prières de rues sont une illégalité", a-t-elle fait valoir. "C'est une manière d'accaparer () un territoire pour y imposer une loi religieuse. Je suis dans mon droit comme responsable politique d'évoquer un sujet fondamental. C'est même un devoir".
Pour le Conseil français du culte musulman, "en comparant les Français de confession musulmane aux nazis, Mme Le Pen a porté atteinte à leur honneur et a pris des raccourcis avec l?histoire".
Et ce sont "de tels propos souvent tenus par certains hommes politiques de tous bords qui alimentent le climat de l'islamophobie ambiant dans lequel on vit actuellement", dénonce le secrétaire général du CFCM et président de l'Observatoire national contre l'Islamophobie, Abdallah Zekri.
L'Observatoire national contre l'Islamophobie du CFCM s'est constitué partie civile aux côtés de trois autres plaignants: le Collectif contre l'islamophobie en France (CCIF), le Mrap et la Ligue judiciaire de défense des musulmans, association présidée par l'avocat Karim Achoui. La Licra compte demander en séance rejoindre le rang des parties civiles.
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