"On ferme!". L'ordre à peine lancé, les soldats hongrois déroulent les barbelés, et les fixent aux colonnes métalliques. Derrière eux, un groupe de migrants s'évanouit dans la nuit. Il est près de 01H00 du matin et la frontière avec la Croatie est désormais close.
Budapest vient de fermer sa frontière avec la Croatie aux migrants. Quelque 185.000 d'entre eux l'ont traversée depuis que la Hongrie a décidé de sceller également sa frontière serbe, le 15 septembre.
Le point de passage privilégié entre la Croatie et la Hongrie est le poste de Zakany, passage officieux en pleine campagne. C'est là qu'une dizaine de gardes et soldats attendaient le dernier groupe de migrants autorisé à franchir les 15 mètres encore ouverts dans la clôture de 3 mètres de haut.
Des voix en arabe sont entendues au loin. Dans l'obscurité, les premiers visages apparaissent.
En file indienne, escortés par la police croate, les migrants marchent silencieux. Beaucoup toussent. Quelques enfants pleurent. Ils sont près de 1.500.
"Restez en ligne!", leur crient les policiers hongrois.
A l'avant du groupe, de jeunes hommes, mêlés à quelques familles, regardent les rouleaux de fils barbelés situés de part et d'autre de l'entrée encore ouverte. Policiers et soldats surveillent, silencieux.
- Dernier train vers l'Autriche -
Les pluies récentes ont transformé le sol en marécage boueux où l'on s'enfonce jusqu'aux chevilles. Les plus âgés ont l'air effrayés à l'idée de parcourir dans ces conditions les 700 mètres qui les séparent de la gare.
"Des milliers de personnes sont passées ici chaque jour durant des semaines. Et pourtant, personne n'a pensé à répandre du gravier ou des copeaux de bois pour rendre le passage plus facile", s'agace auprès de l'AFP un employé d'une ONG.
Une vieille femme, dans sa chaise roulante, s'embourbe. On la porte. Un enfant peine à s'extirper de la boue.
Soudain, le générateur tombe en panne. Dans le noir, ils sont plusieurs à perdre l'équilibre. Quand la lumière revient, dix minutes plus tard, leurs vêtements sont constellés de terre.
Aucun ne sait qu'il fait partie du dernier groupe à passer par cette frontière, ou encore que la Croatie a désormais décidé de transporter les migrants par bus vers la Slovénie.
"Mon oncle arrive derrière, il est en Grèce en ce moment, comment va-t-il faire?", s'inquiète Negin, une artiste de 23 ans qui a quitté l'Iran le mois dernier après avoir été violée par un policier.
Mais quand on l'interroge sur la boue sur ses vêtements, elle sourit. "Je m'en moque bien de mes vêtements! J'ai perdu les miens il y a des semaines. Ce que je porte, ce sont des habits qu'on m'a donnés", dit-elle, avant de s'éloigner.
Il est minuit et demi. Les dernières silhouettes du groupe disparaissent. Plus loin, un train attend pour les transporter en Autriche.
Avec cinquante minutes de retard sur l'horaire prévu,les soldats se mettent en place, prêts à exécuter les ordres. "On ferme!".
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