L'Assemblée nationale a voté jeudi soir le volet du projet de budget pour 2016 touchant à l'aide juridictionnelle, nécessaire selon le gouvernement pour contribuer à la réforme d'un système "à bout de souffle" mais contesté par les avocats, la droite et le centre.
L'aide juridictionnelle (AJ) permet aux plus démunis d'accéder aux services d'un avocat.
La ministre de la Justice Christiane Taubira, qui a souligné la hausse du budget de l'aide juridictionnelle depuis 2012, a mis en avant devant les députés le "courage politique" de continuer à réformer un système "à bout de souffle".
"Aujourd'hui, 57% de l'AJ est faite par 7% des avocats et 84% par 17% des avocats", a-t-elle notamment rappelé.
La garde des Sceaux a aussi insisté sur la "concertation" menée depuis "pratiquement trois ans" avec les représentants de la profession d'avocats, mais évoqué les discussions "rompues depuis deux-trois jours".
Inscrite à l'article 15 du projet de loi de finances débattu en première lecture, la poursuite de la réforme de l'aide juridictionnelle comporte plusieurs mesures pour affecter de nouveaux moyens financiers à l'AJ.
Pomme de discorde avec la profession, il est, entre autres, prévu un prélèvement de cinq millions d'euros en 2016 et dix millions d'euros en 2017 sur les intérêts de fonds placés dans des caisses (Carpa) gérées par les avocats. Le montant de ces produits financiers serait de 75 millions d'euros, selon la Chancellerie.
Mais tous les représentants de la profession des avocats s'opposent à cette contribution financière, arguant que les avocats participent déjà largement au fonctionnement de l'AJ pour laquelle ils estiment être mal rémunérés. "Ce dispositif est transitoire", a notamment plaidé Mme Taubira dans l'hémicycle.
Les avocats ont entamé mardi à minuit une grève de l'aide juridictionnelle, qui était suivie jeudi soir par 125 des 164 barreaux du territoire selon le Conseil national des barreaux (CNB).
"Il m'a été indiqué que la profession aurait exprimé son accord pour une taxation du chiffre d'affaires à partir d'un seuil", a glissé la garde des Sceaux, laissant entendre que cette piste pourrait être envisagée.
Les Républicains, qui ont proposé en vain la suppression de l'article sur l'aide juridictionnelle, ont reproché au gouvernement d'être "généreux avec les poches des autres" et suggéré de rétablir le droit de timbre de 35 euros supprimé par l'actuelle majorité de gauche. L'UDI Charles de Courson s'est interrogé sur une ponction sur des "fonds privés", le secrétaire d'Etat au Budget Christian Eckert lui rétorquant qu'il s'agissait "d'un impôt".
L'article étend aussi l'aide juridictionnelle à l'aide à la médiation.
Il précise également les modalités de calcul de la rétribution des avocats au titre de l'aide juridictionnelle. Chaque acte resterait rétribué par une "unité de valeur" pondérée par type d'acte, mais il est prévu une rétribution complémentaire qui pourrait s'y ajouter, selon des modalités précisées par une convention cadre nationale et des déclinaisons locales.
Le montant de l'unité de valeur, réévalué à 22,84 euros en 2015, sera fixé à 24,20 euros.
Le plafond des ressources pour bénéficier de l'aide juridictionnelle est relevé à 1.000 euros mensuels contre 941 euros actuellement, ce qui rendrait environ 100.000 personnes supplémentaires éligibles.
En 2014, 896.786 personnes ont été admises à cette aide.
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