Les autorités allemandes mettent la pression sur Volkswagen pour enclencher le rappel de millions de voitures équipées d'un logiciel fraudeur en Allemagne et veulent contrôler l'opération, alors que le mastodonte automobile se débat toujours avec les suites du scandale.
"Nous allons ordonner le rappel" de 2,4 millions de véhicules en circulation en Allemagne et équipées d'un moteur truqué, a déclaré un porte-parole de l'Autorité fédérale des transports KBA. L'administration basée à Flensburg (nord) va également "accompagner et contrôler" le processus, a précisé ce porte-parole.
Un peu plus tard le ministre des Transports Alexander Dobrindt, supérieur hiérarchique de la KBA, a justifié ce passage à un encadrement étroit et juridiquement contraignant de l'action du constructeur par "la dimension" du rappel qui "rend nécessaire un certain degré de contrôle".
Il en a profité pour revoir en baisse le nombre de voitures concernées en Allemagne. Le chiffre de 2,8 millions annoncé initialement correspondait à la totalité des voitures porteuses du logiciel incriminé ayant été immatriculées, mais certaines d'entre elles ne sont plus en circulation.
La KBA attend "d'ici fin octobre" la présentation par Volkswagen de sa solution technique pour les moteurs diesel 2 litres - pour lesquels une simple manipulation informatique devrait suffire - et d'ici fin novembre les détails du plan pour les moteurs 1,2 et 1,6 litre, a détaillé M. Dobrindt.
- "coopération constructive" -
Le journal Bild rapportait jeudi que les autorités allemandes "perdaient patience" avec Volkswagen et n'étaient pas disposées à s'en remettre au bon vouloir du constructeur pour corriger le tir. Devant la presse, M. Dobrindt a préféré parler d'un "coopération tout à fait constructive" avec le groupe. Celui-ci n'était pas joignable pour commenter jeudi.
La politique allemande a été réticente à attaquer trop ouvertement Volkswagen, fleuron de l'industrie allemande dont les liens avec les pouvoirs publics sont étroits. L'Etat régional de Basse-Saxe est actionnaire du groupe.
Le nouveau patron de Volkswagen Matthias Müller a indiqué la semaine dernière que les rappels commenceraient en janvier et s'étaleraient sur toute l'année, un délai critiqué par certaines organisations comme Greenpeace comme beaucoup trop long, mais que M. Dobrindt a confirmé jeudi. Entre autres parce que la solution technique pour les moteurs 1,2 et 1,6 litres ne sera pas disponible et prête à l'installation avant septembre 2016.
Volkswagen, géant aux douze marques et 200 milliards d'euros de chiffre d'affaires annuel, a avoué le mois dernier avoir installé sur le moteur diesel de 11 millions de véhicules dans le monde un logiciel capable de fausser les résultats des tests antipollution. Des voitures de marque VW, Audi, Seat et Skoda sont concernés, ainsi que des véhicules utilitaires.
- recherche des responsables -
Outre l'Allemagne, le Royaume-Uni est très touché avec plus d'un million de véhicules, et la France avec près d'un million. Sur une kyrielle de marchés, dont les Etats-Unis où l'affaire a éclaté, Volkswagen s'expose à des amendes et des poursuites judiciaires, certaines déjà engagées. En Allemagne le parquet de Brunswick (nord) enquête pour fraude.
En parallèle de la gestion des conséquences de l'affaire - qui auront aussi des répercussions financières gigantesques, les experts jonglant avec des chiffres allant de 20 à 60 milliards d'euros -, Volkswagen, qui réunissait des cadres jeudi à Leipzig (est), a promis de faire la lumière sur les responsabilités de la manipulation.
Mercredi le magazine allemand Der Spiegel a rapporté que le cercle des responsables comprendrait au moins 30 personnes, là où la direction de Volkswagen a parlé pour le moment d'un "petit groupe de personnes". Volkswagen, qui a déjà mis à pied quatre personnes sans en révéler l'identité, a démenti le chiffre de 30 comme n'ayant "aucun fondement".
L'Allemagne toute entière, très exportatrice et dont le destin est intiment lié à celui de son industrie automobile, s'inquiète de la réputation de ses produits, à un moment critique pour son économie, exposée au tassement de la croissance dans les pays émergents.
Mais la chancelière Angela Merkel s'est montrée certaine que le scandale n'aurait pas d'impact à long terme sur l'industrie de son pays.
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