Les policiers ont commencé à se rassembler place Vendôme devant le ministère de la Justice pour manifester à l'appel de leurs syndicats pour l'un des leurs grièvement blessé, un événement rarissime pour des forces de l'ordre "à bout", entre menace d'attentats et crise migratoire.
Les syndicats, dont les responsables doivent s'exprimer sur place à 13 heures, entendent protester après que l'un des leurs a été grièvement blessé par un malfaiteur en cavale, lors d'une fusillade en Seine-Saint-Denis la semaine dernière, mais leurs doléances vont bien au-delà.
"Les policiers, héros du mois de janvier" après les attentats "sont devenus les oubliés de la République", tonne Jean-Claude Delage pour Alliance, premier syndicat de gardiens de la paix. Nicolas Comte, pour Unité-police SGP, évoque un "état de fatigue préoccupant". "Un ras-le-bol, une perte du sens du métier", renchérit Patrice Ribeiro de Synergie, deuxième syndicat d'officiers.
Tous pointent une "explosion des violences", un "manque de moyens", des "missions peu claires", une "absence de réponses pénales" qui les conduit àappeler unanimement à se rassembler place Vendôme sous les fenêtres de Christiane Taubira et devant les tribunaux en province, ravivant la guerre police/justice.
Et les sollicitations ne risquent pas de diminuer dans les prochains mois, avec deux événements annonciateurs d'une sécurité maximale: la conférence de l'ONU sur les changements climatiques (COP21) au cours de laquelle les représentants de 195 pays sont attendus à Paris début décembre, et l'Euro-2016 de football (10 juin-10 juillet).
- 'libération injustifiée' -
Tentant d'apaiser ses troupes, le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve a prévenu mardi qu'il n'y avait rien à "gagner" à "opposer" police et justice. Le braqueur qui a blessé le policier en Seine-Saint-Denis était en cavale depuis qu'il n'était pas rentré d'une permission accordée en mai.
"Il faut éviter les emportements et les amalgames et toutes propositions qui affaiblissent la relation entre la police et la justice", a-t-il insisté lors d'un discours devant les forces de l'ordre à l'Ecole militaire à Paris.
"Je ne peux accepter que des policiers et des gendarmes puissent être atteints par des personnes qui devaient être en prison", a martelé le ministre de l'Intérieur.
De son côté, la Garde des sceaux s'est dite prête à recevoir les représentants des forces de l'ordre. Devant les procureurs de France réunis à Paris, Mme Taubira a insisté mardi sur la nécessité de "prévenir tout risque de libération injustifiée" de détenus, selon un communiqué. Elle a aussi dit envisager de mieux encadrer les permissions de détenus.
L'Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire) a déploré mardi que l'émotion suscitée par "le drame" d'un policier blessé "par un condamné en état d'évasion" donne lieu "à une polémique stérile visant à opposer artificiellement police et justice".
Jugeant le lieu "trop emblématique" et "peu propice à un rassemblement de masse", les autorités ont demandé ce week-end, selon plusieurs sources proches du dossier, aux organisateurs de se rassembler ailleurs que place Vendôme.
En 1983, une manifestation de quelque 1.500 policiers conspuant les ministres de gauche, devant le ministère de la Justice, après la mort de deux fonctionnaires tués par Action directe est restée dans les mémoires.
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