Les Bélarusses ont commencé à voter dimanche dans un scrutin présidentiel au terme duquel Alexandre Loukachenko est assuré de remporter un cinquième mandat, prolongeant ses 21 ans aux commandes du pays alors que les Européens envisagent de lever les sanctions prises à son égard.
Qualifié de "dernier dictateur d'Europe" par Washington, Alexandre Loukachenko, 61 ans, affronte trois candidats quasiment inconnus lors de cette présidentielle boycottée par l'opposition et marquée par la lassitude des électeurs. Il veut y obtenir un taux de participation convaincant pour que le scrutin soit reconnu par les Occidentaux.
La participation, en début de matinée, a atteint 36%, selon la Commission électorale. La télévision nationale a annoncé que certains bureaux de vote avaient prévu de distribuer de la nourriture et de présenter des concerts aux électeurs pour "créer une atmosphère de vacances".
Venue en chaise roulante avec sa fille de trois ans, Liudmila Vauchok, une championne paralympique, explique à un journaliste de l'AFP avoir voté pour le président Loukachenko, qui a apporté "calme et stabilité" au pays.
Plusieurs autres votants ont exprimé leur appui au président sortant. "Il ne se soumet à personne, il protège les intérêts de son peuple", estime Valentina Artyomovna.
Des observateurs internations de l'OSCE surveillent le scrutin, mais l'opposition estime que le président a déjà faussé les cartes en empêchant ses dirigeants de se présenter au scrutin.
Si le résultat du vote ne laisse que peu de place au suspense, la réaction de l'Union européenne est beaucoup plus attendue, les 28 envisageant de lever les sanctions qui frappent depuis 2011 le président bélarusse en protestation contre la répression violente qui avait suivi sa réélection en 2010.
Les Européens veulent notamment s'assurer qu'"il n'y a pas de nouvelles arrestations d'opposants, pas de violence, pas de persécution de la presse", a expliqué un diplomate à l'AFP.
M. Loukachenko, au pouvoir depuis 1994, a effectivement multiplié les gestes de bonne volonté ces derniers mois, libérant notamment cet été les derniers prisonniers politiques du pays, parmi lesquels l'opposant numéro un Mikola Statkevitch, relâché fin août après cinq ans de prison.
Ce geste a été apprécié par Bruxelles, qui se donne jusqu'à la fin du mois pour décider de lever les sanctions ou de les maintenir.
- 'Dictature douce' -
Aucun des poids lourds de l'opposition démocratique n'a toutefois été autorisé à se présenter au scrutin, leurs candidatures ayant été rejetées par la Commission électorale centrale pour différentes raisons. L'opposition a, en réaction, appelé au boycottage des élections.
"Un boycottage, c'est une position faible. J'ai toujours été contre les boycottages des élections. Mais si on n'a pas de candidat, pourquoi aller voter?", a expliqué à l'AFP Mikola Statkevitch, qui a mené samedi une manifestation de 500 personnes à Minsk.
Convaincu que sa libération de prison avait pour but d'amadouer les Occidentaux à l'approche du scrutin, M. Statkevitch a appelé au maintien des sanctions.
"S'ils sont ensemble avec ce criminel, alors on pourra dire que la démocratie vantée (par les Européens) ne sont que des mots", a-t-il estimé, fataliste.
Le nouveau prix Nobel de littérature, Svetlana Alexievitch, a elle aussi mis en garde les Européens contre tout rapprochement avec celui qui se fait appeler "batka", le "petit père" du Bélarus. "Tous les quatre ans, de nouveaux responsables européens viennent au pouvoir et pensent pouvoir régler le problème Loukachenko sans savoir qu'il est un homme indigne de confiance", a-t-elle déclaré, qualifiant son régime de "dictature douce".
Tout comme l'opposition, l'écrivaine bélarusse ne se fait pas d'illusion sur le résultat de l'élection et les chances de démocratisation du pays, handicapé à ses yeux par ses racines autoritaires.
Seule une des trois adversaires de M. Loukachenko au scrutin, Tatiana Korotkevitch, 38 ans et soutenue par 17,9% des électeurs selon un dernier sondage indépendant, semble faire une campagne électorale, même si la plupart des opposants minimisent sa portée.
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