Quelque six millions de Guinéens sont appelés aux urnes dimanche pour désigner leur président, un scrutin sous tension, dont l'opposition compte déjà contester les résultats, alors que le camp du sortant Alpha Condé le donne vainqueur dès le premier tour.
Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a déploré samedi les récentes violences entre partisans de M. Condé et du chef de l'opposition Cellou Dalein Diallo et appelé à une élection "pacifique et transparente qui reflète la volonté du peuple guinéen".
Ces affrontements ont fait une dizaine de morts depuis jeudi soir, trois à Conakry et sept dans l'est du pays, à Banankoro, selon un dernier bilan de source médicale.
Les 14.482 bureaux de vote seront ouverts dans tout le pays de 07h00 à 18h00 (heure locale et GMT), avec plus de 72.000 agents électoraux.
Les tout premiers résultats ne sont pas attendus avant mardi.
L'enjeu principal porte sur l'éventuelle réélection de M. Condé au premier tour, comme le proclame sa campagne - cinq ans après une victoire à l'arraché sur M. Diallo au second tour -, un objectif que ses adversaires jugent irréalisable sans fraude caractérisée.
Les cartes d'électeur ont été distribuées à plus de 90% dans l'ensemble du pays, a annoncé la Commission électorale nationale indépendante (Céni) à quelques heures de l'ouverture du scrutin.
Les sept concurrents de M. Condé ont invoqué la non-distribution d'une multitude de cartes d'électeur et l'inscription présumée indue sur les listes électorales de nombreuses personnes, "notamment des mineurs", comme motifs pour réclamer un report de l'élection.
Faute des corrections demandées, "les sept candidats ne reconnaîtront pas les résultats qui seront proclamés à l?issue du scrutin organisé avec ces anomalies et irrégularités", affirment-ils dans une déclaration commune.
Plusieurs missions - de l'Union européenne (UE), qui compte 72 observateurs sur tout le pays, de l'Union africaine (UA), de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao) - se sont déployées pour observer le scrutin.
Près de 19.000 policiers, gendarmes et agents de la protection civile sont déployés pour sécuriser le scrutin.
- Réalisation d'un barrage hydro-électrique -
"Généralement ce n'est pas le jour du vote qu'il y a des problèmes, c'est au moment où on proclame les résultats", souligne le Dr Alpha Amadou Bano Barry, professeur de sociologie politique à l'Université de Sonfonia, à Conakry.
"A l'exception de 2010, en Guinée on a toujours gagné au premier tour", rappelle-t-il, estimant qu'un "deuxième tour en Guinée est toujours beaucoup plus conflictuel que le premier", en raison de l'exacerbation des rivalités ethniques.
M. Condé a fait campagne sur son bilan - amoindri, selon lui, par l'épidémie d'Ebola qui s'est déclarée en décembre 2013 - : réforme de l'armée et de la justice, achèvement du barrage hydro-électrique de Kaléta, pour pallier enfin la pénurie criante d'électricité, transparence sur les contrats miniers
Le barrage de Kaléta constitue le "premier acquis" de son mandat et "garantit l'élection au premier tour du Pr Alpha Condé", a déclaré à l'AFP le directeur général du projet, Elhadj Lansana Fofana.
"L'électricité, ce n'est pas une petite chose en Guinée, où cette question a provoqué de nombreuses émeutes par le passé", renchérit Vincent Foucher, spécialiste de la Guinée à l'International Crisis Group (ICG).
Du point de vue de la communauté internationale, "qui a beaucoup de sujets de préoccupation en Afrique de l'Ouest, Alpha Condé est plutôt un bon partenaire", avec notamment l'envoi de soldats dans la force de l'ONU au Mali et "des opportunités d'affaires" pour les investisseurs, souligne-t-il.
Ses adversaires, dont les anciens Premiers ministres Diallo, Sidya Touré et Lansana Kouyaté - six hommes et une femme, Marie Madeleine Dioubaté du Parti des Ecologistes de Guinée (PEG) - accusent Alpha Condé de mauvaise gestion, notamment d'Ebola, d'exercice solitaire du pouvoir et d'attiser les tensions ethniques, notamment envers les Peuls, la communauté de M. Diallo.
Toutes les frontières sont fermées dimanche de 06h00 à minuit (heure locale et GMT) et la circulation exclusivement réservée aux véhicules des observateurs électoraux, des membres du gouvernement, des forces de sécurité, ou munis de laissez-passer de la Haute Autorité de la Communication, selon un décret présidentiel.
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