Le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté vendredi la demande d'arrêt des traitements de Vincent Lambert réclamé par son neveu, entraînant de facto le maintien en vie artificielle de ce patient de 39 ans, en état végétatif depuis 2008.
François Lambert, le neveu de l'ancien infirmier psychiatrique victime de lésions cérébrales irréversibles après un accident la route en septembre 2008, a décidé de faire appel de cette décision, a-t-il indiqué à l'AFP. Il était à l'origine de la saisine.
Les juges administratifs ont estimé que les médecins du CHU de Reims, où est hospitalisé Vincent Lambert depuis 2008, étaient en droit, en vertu de leur "indépendance professionnelle et morale", de suspendre le processus d'arrêt des traitements engagé en juillet après les décisions du Conseil d'Etat et de la Cour européenne validant l'interruption des soins.
François Lambert réclamait l'application par le CHU de Reims de la décision prise le 11 janvier 2014 par le docteur Eric Kariger en charge à l'époque de Vincent Lambert, de stopper l'alimentation et l'hydratation artificielles de son patient en l'accompagnant jusqu'à la mort par des soins palliatifs.
L'arrêt des traitements, plusieurs fois contesté en justice par les parents, catholiques traditionalistes farouchement décidés à maintenir en vie leur fils, avait finalement été validé par le Conseil d'Etat pour qui la continuation des soins de Vincent Lambert constituait une obstination déraisonnable puis, en juin 2015, par la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH).
Après l'avis de la CEDH, le docteur Daniela Simon, désormais en charge de Vincent, avait engagé une "nouvelle procédure collégiale en vue d'une décision d'arrêt des soins". Mais elle l'avait suspendue à la surprise générale une semaine plus tard au motif officiel de pressions extérieures nuisant à la "sécurité" du patient comme des équipes médicales, notamment après des menaces d'enlèvement publiées dans un blog.
- "Maintien artificiel de la vie" -
Selon le tribunal administratif qui a suivi les recommandations de la rapporteure publique, la décision d'arrêt de traitements ne peut être prise "qu'à titre personnel par le seul médecin en charge du patient", l'hôpital ne pouvant s'y opposer.
Les juges ont également estimé qu'une précédente décision médicale ne pouvait pas s'imposer de fait à un nouveau médecin.
"Les décisions d'un médecin engage l'hôpital, dans ce sens le CHU en tant que personne morale doit les appliquer", a expliqué à l'AFP Bruno Lorit, l'avocat de François Lambert.
"Ce jugement rejette la responsabilité sur la médecin qui recule du fait de la pression des lobbies pro-vie et d'une partie de la famille de Vincent. Cette médecin n'est de fait ni encouragée par la justice, ni par sa hiérarchie", a pour sa part déploré le neveu de Vincent.
Interrogée par France Inter mardi sur Vincent Lambert, la ministre de la Santé Marisol Touraine a affirmé qu'"aucune cour de justice n'impose à un hôpital d'arrêter des traitements, c'est à la structure hospitalière de prendre cette décision". "La Cour européenne a dit que c'était possible mais l'hôpital a choisi jusqu'à maintenant de prendre un peu de temps", a-t-elle ajouté.
Le même jour, sur La Chaine Parlementaire (LCP), Jean Leonetti (Les Républicains) un des auteurs de la loi sur la fin de vie avait estimé que les traitements prodigués à Vincent Lambert n'avaient "pas d'autre but que le maintien artificiel de la vie"
"On est en droit médicalement d'arrêter les traitements (de Vincent Lambert), de l'endormir profondément et de ne pas poursuivre cette vie", avait-il expliqué en dénonçant la "pression très forte d'un certain nombre de lobbies et de la famille".
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