Véronique, Baptiste et Saliha ont chacun un enfant parti faire le jihad en Syrie, Jonathan une soeur de 17 ans. Face caméra, la voix parfois brisée par l'émotion, ils disent leur incompréhension et leurs souffrances. Pour que ça se sache.
Le gouvernement lance mercredi une série de quatre spots télévisés dans lesquels quatre familles concernées témoignent pour sensibiliser l'opinion sur le départ de jeunes Français partis faire le jihad en Syrie.
Ces brefs témoignages ont été recueillis par la productrice Fabienne Servan-Schreiber. Ils disent tous la douleur de ceux qui "n'ont pas compris" et "rien vu".
Ils renvoient au numéro vert de signalement des candidats au jihad, créé le 29 avril 2014 par le ministère de l'Intérieur pour les familles et proches de jeunes déjà partis en Syrie ou en Irak ou susceptibles de le faire. Cette plateforme a enregistré plus de 3.000 signalements, dont 23% concernent des mineurs parmi lesquels une majorité de jeunes filles.
Le gouvernement entend ainsi "produire un contre-discours", a expliqué le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve en présentant cette campagne.
Il y a "1.300 individus concernés par ces filières jihadistes, plus de 500 Français ou résidents en France se trouvent aujourd'hui en Syrie ou Irak", a déclaré le Premier ministre Manuel Valls mercredi sur RTL. Il y a aussi "des centaines, voire des milliers de jeunes concernés par la radicalisation, c'est un défi considérable pour la société qui nécessite qu'on mobilise les familles".
Plus d'une vingtaine de médias et sites internet diffuseront ces spots gratuitement: TF1, TV5 Monde, France Télévisions, Facebook, Dailymotion, la chaîne de cinéma UGC, Orange ainsi que des quotidiens ou hebdomadaires nationaux.
- 'C'est une torture' -
La fille de Baptiste avait 17 ans quand elle est partie, emmenée par un ami dont elle avait fait la connaissance sur un site de rencontres et qui est devenu l'un des porte-parole du groupe jihadiste État islamique. "Elle pris un sac à dos, un chapeau et a disparu", dit-il face caméra, au bord des larmes. "Toute la terre nous est tombée dessus, on nous a volé notre enfant."
Quentin, 23 ans aujourd'hui, est parti en 2013 pour, a-t-il affirmé, "aider les gens". Véronique, sa mère, raconte sa "conversion" puis son basculement dans un islam très rigoriste, les moments où il évoquait à tout bout de champ les "prophètes" en refusant de s'asseoir à la table familiale. "C'était péché".
"Nous avons essayé de lui dire que l'islam ce n'est pas cela, on pensait qu'il allait évoluer vers une pratique plus douce, des imams lui ont tendu la main", raconte-t-elle. En vain. "C'est une torture, nous n'avons pas de réponse, on a été pris de court", ajoute Véronique.
Un autre dont la soeur est partie - qui n'apparaît pas dans les spots - a témoigné de son combat pour la retrouver en Syrie. Il rapporte s'être entendu dire: "Tu n'as qu'à égorger trois policiers" en France, "on te ramène ta soeur".
Charline, 20 ans, s'est mariée en France à un islamiste qu'elle décrit comme radical. Après s'en être sortie, elle parle de sa vie d'avant avec lui comme d'une "secte". Elle veut protéger leur enfant de deux ans pour, soutient-elle, lui éviter le "départ" avec le père. Et réclame donc une interdiction de sortie du territoire français pour lui.
"Nous sommes engagés dans un combat extrêmement difficile" contre le terrorisme, a déclaré M. Cazeneuve. "Il charrie beaucoup de souffrances, de ruptures, de tragédies () pour des familles dont l'un des leurs à basculé."
Le gouvernement, selon la secrétaire d'État à la Famille Laurence Rossignol, entend aussi créer "un réseau d'entraide psychologique parental" afin "de combattre l'embrigadement".
Les spots sont mis en ligne sur le site www.stop-djihadisme.gouv.fr.
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