L'écrivain suédois Henning Mankell, père du célèbre commissaire Kurt Wallander qui incarnait une vision désabusée de la social-démocratie scandinave, est décédé dans la nuit de dimanche à lundi des suites d'un cancer à l'âge de 67 ans.
Henning Mankell, qui avait révélé en 2014 souffrir d'un cancer, "s'est éteint paisiblement cette nuit à Göteborg", dans le sud-ouest de la Suède, a annoncé son éditeur suédois Dan Israel avec qui il avait fondé la maison Leopard en 2001.
"Mon anxiété est très profonde, bien que j'arrive largement à la contrôler", avouait-il au sujet du mal qui le rongeait.
Henning Mankell, qui vivait entre la Suède et le Mozambique, était l'un des auteurs phares de la littérature policière nordique aux côtés des Stieg Larson, Jo Nesbo, Arnaldur Indridason ou encore Maj Sjöwall et Per Wahlöö, considérés comme les précurseurs du genre.
"Il a décrit les coulisses sombres du modèle nordique", analyse pour l'AFP le journaliste Olivier Truc, auteur du "Dernier Lapon" (Métailié), polar arctique qui a raflé 23 prix littéraires. "Il assumait son rôle de critique" envers "une social-démocratie qui a trahi la classe ouvrière".
Henning Mankell laisse une oeuvre riche d'une quarantaine de titres, dont 12 dans la série Wallander et une douzaine pour enfants, écoulés à 40 millions d'exemplaires dans le monde.
Henning Mankell était marié à Eva Bergman, 70 ans, fille du cinéaste Ingmar Bergman dont il était proche.
"Homme inquiet" - titre de l'avant-dernier opus de la série Wallander - dont l'horreur des injustices n'avait d'égal que l'indignation et l'empathie, Mankell avait trouvé dans le personnage de Kurt Wallander son double assermenté.
Ce policier de la petite ville côtière d'Ystad à la personnalité difficile était devenu un personnage de série de la BBC, joué par l'acteur britannique Kenneth Branagh.
Depuis, Ystad voit défiler des lecteurs venus du monde entier mettre leurs pas dans ceux du flic le plus célèbre du royaume scandinave et revivre le frisson des "Chiens de Riga" ou de "La lionne blanche".
"Je suis effondrée", a confié à l'AFP Anne Freyer qui le publiait en France depuis 25 ans et devait le retrouver à la Fête du livre, à Aix-en-Provence (sud de la France), du 9 au 11 octobre. "C'était un grand homme et un ami" mais aussi un "homme terriblement imprévisible", dit-elle.
- 'Un pied dans le sable' -
Vivant une partie de l'année dans la capitale mozambicaine Maputo, Henning Mankell y dirigeait le Teatro Avenida pour, disait-il dans un entretien à l'AFP en 2011, "observer le monde depuis un autre endroit que "notre Europe ethnocentrique".
Depuis sa découverte du continent africain dans les années 1970, il aimait à dire qu'il avait "un pied dans la neige, un pied dans le sable".
Et quand on lui demandait quel était à ses yeux le centre de l'Europe, il répondait "la petite île de Lampedusa, au sud de la Sicile", d'où débarquent chaque année des dizaines de milliers de migrants.
En juin 2010, il se trouvait aussi à bord d'une flottille de militants pour Gaza attaquée par un commando israélien.
"Aucun blocus dans l'histoire mondiale n'a perduré éternellement () Personne n'accepte la soumission. Tôt ou tard Israël connaîtra ce que le système de l'apartheid a connu en Afrique du Sud", affirmait l'écrivain.
"Je suis un homme en colère" face aux injustices et aux inégalités, justifiait-il. Contre les extrémismes, les intégrismes religieux ou les violences faites aux femmes et aux enfants, Wallander partageait ces colères.
"L'écriture était vitale pour Henning", a réagi Dan Israel, cité par l'agence TT, qui a rencontré l'écrivain quelques jours avant sa mort. "Il envisageait d'écrire un nouveau Wallander pour les 25 ans de la série l'an prochain", a-t-il assuré.
"Il pensait sûrement tenir plus longtemps" face à la maladie, a ajouté l'éditeur.
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousA lire aussi
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.