Les Etats-Unis promettent une "enquête exhaustive" sur le bombardement de l'hôpital de l'ONG Médecins sans Frontières (MSF) dans la ville afghane de Kunduz, qui a fait 19 morts et pourrait être dû à un raid américain.
Le secrétaire américain à la Défense Ashton Carter a annoncé samedi qu'une "enquête exhaustive" était en cours sur ce bombardement, qualifié par l'ONU d'"inexcusable" et de "potentiellement criminel".
Selon le dernier bilan communiqué par l'ONG, la frappe a coûté la vie à 19 personnes, 12 employés, et sept patients, parmi lesquels trois enfants. Au moins 37 personnes ont été blessées.
Dans un message de condoléances, le président Barack Obama dit attendre les résultats de l'enquête "avant de porter un jugement définitif sur les circonstances de cette tragédie".
Cette frappe aérienne pourrait relever du "crime de guerre" si elle était jugée "délibérée par la justice", a déclaré le Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l'Homme Zeid Ra'ad Al Hussein, qui a appelé à une enquête approfondie et transparente.
L'Alliance atlantique, qui dispose toujours de 13.000 hommes - dont 10.000 Américains - en Afghanistan, n'a pas officiellement reconnu que le bombardement de l'hôpital de MSF était bien lié à un raid américain et se limite à parler de "possibles dommages collatéraux" d'une opération aérienne, un qualificatif rejeté par MSF.
Dans un communiqué, Meinie Nicolai, la présidente de l'organisation humanitaire, exige "la transparence la plus totale des forces de la Coalition", affirmant refuser le terme de "+dommages collatéraux+".
Selon un responsable américain, l'enquête va porter sur le rôle joué par un avion américain AC-130, un appareil dérivé de l'avion de transport C-130 équipé de plusieurs canons pour mener des opérations d'appui au sol.
Le général John Campbell, le chef de la mission de l'Otan en Afghanistan et commandant des troupes américaines sur place, "envoie un général à Kunduz pour mener ces investigations", a déclaré un responsable américain à l'AFP.
- "Impacts ciblés" -
La fureur des Nations unies est alimentée par le récit de MSF. Dans une interview à l'AFP, le directeur des opérations Bart Janssens a affirmé que des bombardements se sont poursuivis "pendant plus 45 minutes" après que l'ONG a averti les armées afghane et américaine que son établissement de Kunduz avait été touché par de premiers tirs.
MSF assure avoir transmis préventivement les coordonnées GPS de son hôpital à "toutes les parties" du conflit, et "notamment à Kaboul et Washington". "Les impacts étaient très ciblés, toujours sur le même bâtiment. L'avion est parti, puis il est revenu pour redonner suite à une série d'impacts, exactement sur le même bâtiment", a expliqué le Dr Janssens.
Au moment du bombardement, 105 patients et 80 membres du personnel, des Afghans et des étrangers, étaient présents dans l'hôpital de cette grande ville du nord qui a été le théâtre d'âpres combats entre les talibans et les forces de sécurité afghanes cette semaine.
L'opération visait sans doute "des terroristes armés qui ont attaqué l'hôpital de MSF et l'ont utilisé en tant que base pour attaquer les forces afghanes et les civils", selon le ministère afghan de la Défense.
"Les patients qui n'étaient pas en état de fuir ont été carbonisés dans leurs lits", a raconté Heman Nagarathnam, chef des programmes de MSF pour le nord de l'Afghanistan, citée dans un communiqué.
Le centre de soins de MSF a apporté une aide cruciale à la population civile dès lundi et la prise de Kunduz par les talibans, puis la contre-offensive des forces de sécurité afghanes. C'est le seul hôpital dans cette région du nord de l'Afghanistan capable de traiter des grands blessés. "Il a traité 394 blessés depuis lundi", a expliqué Bart Janssens.
La Croix-Rouge a parlé d'une "effroyable tragédie", tandis que la France a appelé à ce qu'"une enquête soit conduite". Le secrétaire général de l'Otan, Jens Stoltenberg, s'est dit "profondément attristé".
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