Barack Obama a mis en garde Vladimir Poutine contre une stratégie consistant à prendre pour cible à la fois les jihadistes du groupe Etat islamique (EI) et l'opposition modérée à Bachar al-Assad.
Faisant écho aux propos de son homologue français François Hollande, le président américain a jugé vendredi que l'approche actuelle de Moscou, qui revient à considérer que les opposants au régime sont "tous des terroristes", était synonyme de "catastrophe assurée".
Les frappes aériennes de Moscou contre l'opposition modérée "vont être contre-productives", a-t-il martelé au cours d'une conférence de presse, jugeant que Moscou soutenait un régime "rejeté par une écrasante majorité de la population".
Depuis le début de l'insurrection en Syrie, brutalement réprimée par le régime, plus de 240.000 personnes sont mortes et quatre millions ont quitté le pays, occasionnant une crise migratoire majeure.
Pour M. Obama, une coopération avec M. Poutine sur le dossier syrien reste possible à condition qu'il reconnaisse qu'un changement de régime est nécessaire et encourage une transition politique.
Déclenché en mars 2011, le conflit en Syrie, déjà très complexe, a pris un nouveau tournant avec l'implication des Russes qui effectuent depuis mercredi des raids sur la Syrie au nom de la lutte "contre le terrorisme". Mais l'Occident et les pays arabes soupçonnent Moscou de concentrer ses attaques sur les autres opposants au régime syrien, à un moment où Bachar al-Assad semble fragilisé sur le terrain.
D'après le ministre britannique de la Défense, Michael Fallon, les services de renseignement britanniques ont observé que seules 5% des frappes russes avaient visé les combattants de l'EI, et que la majorité des raids avaient en fait "tué des civils" et s'en étaient pris à l'opposition modérée.
Il a estimé que l'intervention russe avait davantage "compliqué" la situation.
Une coalition d'une soixantaine de pays menée par les Etats-Unis - et à laquelle la Russie ne participe pas - mène, elle, depuis septembre 2014 des frappes contre l'EI en Syrie.
En marge d'un sommet sur l'Ukraine à Paris, M. Hollande a assuré avoir insisté auprès de M. Poutine sur la nécessité de viser "Daech et uniquement Daech" (l'acronyme arabe de l'EI). "Nous avons tous les deux insisté sur le fait que l'EI est l'ennemi que nous devons vraiment combattre", a renchéri la chancelière allemande Angela Merkel.
Les Russes ne prétendent pas frapper exclusivement l'EI, mais assurent qu'un certain nombre de leurs bombardements ont touché les positions jihadistes.
Vendredi soir, le ministère russe de la Défense a ainsi indiqué que six nouvelles frappes avait visé l'EI dans la journée, dans les provinces d'Idleb (nord-ouest) et de Hama (centre).
Une source sécuritaire sur le terrain a également signalé des frappes dans ces provinces, où est surtout présent le Front al-Nosra, branche syrienne d'Al-Qaïda qui se bat à la fois contre l'EI et contre le régime syrien.
- "Trois à quatre mois" de raids -
Le gouvernement russe a en outre révélé qu'un premier raid avait eu lieu jeudi sur la province de Raqa, fief de l'EI. Ces frappes ont provoqué la mort d'au moins 12 jihadistes, a déclaré l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).
L'EI a annulé la prière du vendredi par peur des raids russes, a ajouté cette ONG.
Selon une personne originaire de la ville de Raqa, Abou Mohammad, "les habitants effrayés se terraient dans les caves ou chez eux. L'EI, pour sa part, a coupé l'électricité la nuit quand les avions russes survolaient la ville".
Les Russes, qui ont déployé plus de 50 avions et hélicoptères en Syrie, n'ont pas l'intention d'en rester là. Les raids vont durer "trois à quatre mois" et "s'intensifier", a assuré le président de la Commission des Affaires étrangères de la Douma (chambre basse du Parlement russe), Alexeï Pouchkov.
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