Les forces afghanes ont repris jeudi une partie de la ville stratégique de Kunduz des mains des talibans, qui bataillaient fermement pour conserver leur ascendant dans certains quartiers.
La reprise de Kunduz, si elle devait se confirmer, serait loin de marquer pour Kaboul une victoire sur le long terme contre les talibans, qui ont montré ces derniers jours leur puissance dans cette région du nord du pays, où ils combattent les forces gouvernementales sur plusieurs fronts.
De nombreux habitants avaient indiqué à l'AFP en début de journée que l'armée avait repris dans la nuit plusieurs quartiers centraux de la ville aux rebelles islamistes, qui s'en étaient emparés lundi à la faveur d'une offensive éclair marquant leur première prise d'une ville majeure du pays en près de 14 ans d'insurrection.
"Les forces afghanes ont repris le contrôle de Kunduz", a affirmé Sediq Sediqqi, porte-parole du ministère de l'Intérieur, prévenant toutefois que "les opérations de dégagement vont encore prendre du temps, car des talibans tirent depuis les maisons et ils ont installé des engins explosifs".
Les talibans ont démenti tout recul, leur porte-parole Zabihullah Mujahid assurant même que ses combattants avaient "repoussé les envahisseurs et les forces du gouvernement fantoche" hors de Kunduz.
Mais un commandant rebelle interrogé par l'AFP sous couvert d'anonymat a indiqué que les insurgés étaient en train de quitter la ville, ouvrant la voie à sa reprise totale par le gouvernement.
"Les talibans ont quitté la plupart des quartiers, mais cette retraite fait partie d'une stratégie. Notre but (en attaquant la ville) était de montrer notre force, et nous avons réussi. Nous avons prouvé que nous pouvons prendre n'importe quelle ville quand nous le voulons", a-t-il expliqué.
Si le centre-ville a été rendu à ses habitants, des combats se poursuivaient à la périphérie de Kunduz, verrou stratégique sur la route menant au Tadjikistan, loin des fiefs talibans à la lisière du Pakistan.
"Des talibans se sont repliés dans un immeuble d'où ils tirent sur l'armée. Les combats se sont intensifiés ces dernières heures", a déclaré Abdul Rahman, un policier. Et des habitants ont dit entendre des échanges de tirs et des explosions dans l'après-midi.
- Frappes américaines -
La prise de Kunduz en quelques heures lundi, puis son occupation par les insurgés, resteront dans tous les cas comme un très grave revers pour le président Ashraf Ghani, en place depuis tout juste un an, et les forces armées, seules en première ligne depuis la fin de la mission de combat de l'Otan en décembre.
L'Alliance ne compte plus que 13.000 soldats en Afghanistan, cantonnés à un rôle de conseil et de formation. Mais face à la débâcle des troupes afghanes, des soldats allemands, américains et britanniques des forces spéciales ont été envoyés à Kunduz. L'armée américaine a procédé à plusieurs frappes aériennes contre les talibans.
Sur un terrain plus symbolique, le drapeau tricolore de l'Afghanistan avait remplacé la bannière blanche frappée de la chahada, la profession de foi musulmane, des talibans, hissée sous les vivats des insurgés lundi sur la place principale de Kunduz, a rapporté Abdul Rahman. Dans la matinée, des habitants affirmaient que des cadavres de talibans jonchaient les rues.
Au cours des trois jours d'occupation, qui a poussé des milliers à fuir la ville, au moins 49 personnes ont été tuées et 330 blessées, selon une source sanitaire locale. "Notre centre de soins tourne au-delà de ses capacités. Nous avons comptabilisé 40 morts et traité 296 blessés, dont 64 enfants", a expliqué une porte-parole de l'ONG Médecins sans Frontières (MSF) qui dispose d'une clinique sur place.
- Pourparlers de paix -
Les talibans ont également lancé de féroces offensives cette semaine dans les provinces de Baghlan et Takhar, voisines de Kunduz, une région relativement stable par le passé.
La chute de Kunduz constitue le premier grand succès du nouveau chef des talibans, le mollah Akhtar Mansour, couronné cet été après l'annonce tardive de la mort du mollah Omar, et dont l'autorité avait depuis été mise à mal par des divisions internes.
"Les talibans savent qu'ils n'ont pas les moyens de garder le contrôle d'une grande ville comme Kunduz. Mais la prise de la ville montre tout le poids qu'ils auront lors de futurs pourparlers de paix", estime l'analyste militaire Atiqullah Amarkhil.
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousA lire aussi
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.