L'armée afghane, épaulée par l'armée de l'air américaine, se battait dans Kunduz mardi pour tenter de déloger les rebelles talibans de ce carrefour stratégique du nord dont les insurgés se sont emparés la veille à la faveur d'un assaut-éclair.
En début de soirée, peu d'informations filtraient sur le déroulement de cette contre-offensive. "Nos forces avancent dans la ville", a assuré le président afghan Ashraf Ghani. Son premier anniversaire à la tête de l'Afghanistan coïncide avec cette cinglante défaite, qui permet au nouveau chef des talibans, le mollah Akhtar Mansour, de signer la première grande victoire de son ère.
Les opérations de l'armée afghane sont effectuées par "des renforts" en provenance de plusieurs provinces, dont des forces spéciales. Le quartier général de la police et la prison, vidée lundi de ses détenus par les insurgés, ont été repris, a assuré le ministère afghan de la Défense dans un communiqué. Sur les 600 prisonniers libérés, "110 étaient des talibans", a indiqué Rahmatullah Nabil, le chef du renseignement afghan.
L'armée afghane ne peut plus guère compter sur l'appui des troupes de l'Otan dont les 13.000 soldats encore déployés en Afghanistan se limitent à conseiller et former leurs homologues afghans.
En revanche, les Américains, qui procèdent régulièrement à des frappes contre les insurgés dans l'est, ont fourni un soutien aérien aux forces gouvernementales en faisant un raid aérien dans les environs de Kunduz destiné à "éliminer une menace" non précisée, selon la mission de l'Otan.
Une aide venue du ciel qui vise à soutenir des militaires afghans vite débordés lundi face aux insurgés islamistes. La tâche de l'armée dans cette ville est très ardue, car "l'ennemi utilise des habitants comme boucliers humains", d'après Ashraf Ghani.
- Application de la charia -
Les talibans ont incité les habitants de Kunduz à reprendre une "vie normale", signe de leur volonté de gagner les c?urs des civils. Dans une vidéo diffusée sur Facebook, ils hissent le drapeau blanc de leur mouvement dans le centre-ville et disent vouloir appliquer la charia, la loi islamique, signe qu'ils comptent s'installer durablement. Ils promettent aussi une "amnistie générale" aux soldats qui déserteraient.
Un éventuel rétablissement du régime des talibans (1996-2001), notoirement discriminatoire envers les femmes, faisait trembler certaines habitantes de Kunduz. "Nous avons peur de sortir de chez nous, d'être frappées par les talibans", a raconté Sadiqa Sherza, une femme qui dirige Roshani Radio. "Il n'y a pas d'électricité, pas d'eau".
Le ministère de la Santé a fourni un bilan de 16 morts depuis lundi, sans toutefois dire s'il s'agissait de civils et/ou de soldats.
La prise de Kunduz, avec ses 300.000 habitants, a un impact d'autant plus grand qu'elle est intervenue tout juste un an après l'avènement du gouvernement d'union nationale d'Ashraf Ghani. Proche des Occidentaux, M. Ghani avait été élu sur la promesse de ramener la paix dans son pays déchiré par plus de 30 ans de conflit, dont 14 avec les talibans.
Dès lundi soir, le chef des talibans, le mollah Akhtar Mansour, nommé cet été après l'annonce tardive de la mort (apparemment début 2013) du mollah Omar, qui avait d'ailleurs abouti au report sine die des premiers pourparlers de paix directs entamés avec Kaboul en juillet, a salué une "grande victoire" de ses combattants.
La prise de Kunduz, noeud commercial stratégique situé à moins de 100 km de la frontière avec le Tadjikistan, semble également une victoire personnelle pour le mollah Mansour, dont l'autorité a été mise à mal par des divisions internes, nourries notamment par la famille du mollah Omar, qui a contesté sa désignation.
"Nous ne pourrons peut-être pas tenir la ville sur le long terme, mais (cette opération) est une réponse au gouvernement qui affirme que nous ne sommes forts que le long de la frontière avec le Pakistan", dans l'est et le sud de l'Afghanistan, a dit à l'AFP un commandant taliban installé à Peshawar, au Pakistan.
L'armée et la police afghanes doivent dans le même temps faire face à la menace grandissante du groupe Etat islamique (EI). Jusqu'ici, l'EI s'attachait à combattre les talibans, mais ce groupe islamiste a commencé dimanche à s'en prendre aux forces gouvernementales.
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