Bernard Tapie a demandé mardi à la justice entre 516 millions et 1,174 milliard d'euros en réparation du préjudice économique lors de la revente d'Adidas par le Crédit Lyonnais, qu'il accuse de l'avoir floué au début des années 1990.
A ces montants, son avocat Emmanuel Gaillard a demandé à la cour d'appel de Paris, d'ajouter un "préjudice moral et personnel". Il a chiffré à 50 millions d'euros le prix de "la banalisation de l'insulte" et de "l'intensité et la durée des attaques conduites à l'encontre des époux Tapie depuis plus de 20 ans".
Si elles étaient accordées, ces sommes excéderaient la sentence arbitrale de quelque 400 millions d'euros, dont avait bénéficié Bernard Tapie en 2008 mais annulée en février par la cour d'appel en raison des soupçons d'escroquerie l'entachant. Bernard Tapie est mis en examen avec cinq autres personnes dans ce dossier.
Les avocats du Consortium de réalisation (CDR), la structure chargée de gérer l'héritage du Lyonnais, contesteront mardi après-midi les exigences de Bernard Tapie, 72 ans, absent à l'audience. La décision devrait être mise en délibéré.
- "Génies malhonnêtes de la finance" -
Depuis plus de vingt ans, Bernard Tapie estime avoir été trahi par le Crédit Lyonnais dans la revente d'Adidas à l'homme d'affaires Robert Louis-Dreyfus en 1994.
Mardi, ses avocats, Mes Emmanuel Gaillard et Jean-Georges Betto, ont eu des mots très durs pour la banque publique et ses représentants, "génies malhonnêtes de la finance", qui auraient prémédité et organisé la "captation" des avoirs de Bernard Tapie et prêté leur "main à un dessein politique", son élimination. Pour ses adversaires, Bernard Tapie était informé du montage et aurait été sauvé de la faillite par le rachat par le Lyonnais de ses parts dans Adidas.
En décembre 1992, quand il décide de cesser ses activités économiques, Bernard Tapie est encore au sommet: il est un protégé de François Mitterrand, ministre de la Ville en pleine ascension politique à Marseille où son club remportera en mai la Ligue des Champions de football.
C'est aussi un homme qui, selon la partie adverse, est lourdement endetté. Un scénario que conteste Bernard Tapie. Quand bien même, il serait exact, il s'apparenterait à "de l'exploitation de l'état de nécessité", a plaidé Me Gaillard.
Au tout début des années 1990, Bernard Tapie avait acquis Adidas via sa société allemande Bernard Tapie GmBH, pour 1,6 milliard de francs, appuyé sur un pool bancaire mené par une filiale du Lyonnais, la Société de banque occidentale (SdBO).
- Structures offshore -
Fin 1992, un accord est conclu avec la SdBO qui prévoit l'apurement de ses dettes, notamment par la vente de ses parts dans Adidas, soit 80% du capital. Il donne un mandat de vente au Crédit lyonnais pour 2,085 milliards de francs, soit près de 320 millions d'euros.
Deux mois plus tard, le 12 février 1993, les actions étaient achetées à ce prix par huit acquéreurs, dont une filiale du Lyonnais, Clinvest, des sociétés off-shore et une structure luxembourgeoise appartenant à l'homme d'affaires Robert Louis-Dreyfus, dit "RLD", aujourd'hui décédé. Or, le même jour, ce groupe d'acquéreurs consent une promesse de vente des titres à une société de "RLD" pour près de 3,5 milliards de francs, option levée fin 1994.
Pour le camp Tapie, il y a eu tromperie, avec un montage conçu à l'avance dans l'objectif de capter la plus-value sur la vente d'Adidas, notamment par le biais des structures off-shore. Il y aurait eu déloyauté du Lyonnais, banque historique de Tapie, qui n'aurait pas respecté son obligation de conseil. Si ce scénario était choisi, le préjudice est de 516 MEUR.
Mais l'ex-ministre à un deuxième grief: la mise en Bourse de la société à Francfort en 1995 qui la valorise à 11 milliards de francs et sur laquelle la banque touchera une rémunération. L'homme d'affaires assure qu'éclairé par le Lyonnais d'un projet de mise en Bourse, il l'aurait fait lui-même. Dans ce scénario, c'est 1,174 milliard que réclame Bernard Tapie.
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