Premier dirigeant de gauche radicale en Europe, Alexis Tsipras s'est imposé à 41 ans comme le maître du jeu politique en Grèce, décrochant en dépit de ses revirements une deuxième chance de gouverner et sortir le pays de la crise.
Ce leader charismatique que les sondages disaient talonné par son rival de droite Vangelis Meïmarakis a raflé la mise en se faisant le garant des réformes en profondeur auxquelles aspire le pays, en dépit de la désillusion d'une grande partie de son électorat, après son feu vert à un nouveau plan de sauvetage financier UE-FMI.
Lâché fin août par son aile gauche pour ce revirement, il avait fait le pari des élections pour reconquérir assise électorale et légitimité, et démissionné le 20 août. S'il devra comme lors de son arrivée au pouvoir en janvier se trouver des partenaires pour gouverner, l'ampleur de sa victoire lui facilite d'emblée la tâche, d'autant qu'il est désormais seul maître à bord à la tête du parti Syriza.
Son sang-froid et son génie man?uvrier lui avaient déjà valu, même à contre-c?ur, l'estime de nombre de capitales européennes.
Tout au long de sa campagne, très personnalisée, ce benjamin de la vie politique a promis une Grèce nouvelle, sûre d'elle dans l'Union européenne et débarrassée de ses archaïsmes clientélistes.
Hissé dès 33 ans à la tête du Synaspismos, une nébuleuse de fractions dont il a fait le parti de gouvernement Syriza, il a joué de son intégrité, qui tranche avec la réputation de la classe politique en Grèce, pour incarner cette rupture.
Jamais de cravate, pas de mariage, une prestation de serment sur sa conscience plutôt que sur la "Sainte Trinité": les arrangements avec le pouvoir semblent glisser sur cet ingénieur civil, qui partage toujours sa vie avec une ancienne camarade de lycée, mère de ses deux fils.
Exposé au risque de ne plus incarner d'alternative auprès de ses électeurs, pour s'être finalement plié aux diktats des créanciers du pays, il a gardé le cap à gauche, promettant une mise en ?uvre plus sociale et équitable de plan de redressement du pays.
Il a aussi défendu ces derniers jours la politique de portes ouvertes aux migrants, et surtout aux flux de réfugiés syriens, suivie par son gouvernement. Il s'est targué d'avoir ainsi incité l'UE à plus de solidarité avec les pays en première ligne.
- 'Travail et luttes' -
"Devant nous s'ouvre la voie du travail et des luttes", a-t-il tweeté une fois sa large victoire reconnue par M. Meïmarakis. "La lutte continue" avait déjà lancé lors de sa campagne ce militant de gauche de toujours, passé au lycée par les Jeunesses communistes et admirateur de Che Guevara.
En allant voter, il avait promis "un gouvernement de combat" qui "continuera avec la même détermination, le même sens du sacrifice, à mener des batailles pour défendre les droits de notre peuple", à l'encontre de la vulgate néolibérale.
C'est avec la même combativité, face à des partenaires européens impatients de le faire céder, qu'il avait organisé le 5 juillet un référendum conclu par un retentissant rejet, à 62%, d'une première feuille de route UE-FMI.
Mais restait à gérer cette victoire rétrospectivement embarrassante, quand après l'instauration d'un contrôle des capitaux, toujours en vigueur, et des menaces très précises de sortie de la Grèce de l'euro, il a dû capituler le 13 juillet et accepter un troisième plan de sauvetage financier du pays.
Ce n'est que cette semaine-là, en sept mois de rebondissements quotidiens, discours enflammés, rencontres tendues, débats parlementaires sans fin, et généralement nocturnes, qu'il avait laissé percer quelques signes de fatigue.
Face aux électeurs, il a expliqué avoir dû céder et signer un pacte financier "très douloureux" face à la puissance des "forces asymétriques" contre lesquelles il a dû batailler dans une Europe majoritairement à droite et adepte de l'orthodoxie budgétaire à l'allemande.
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