L'ancien Premier ministre François Fillon appelle à "faire sauter" le "tabou" des statistiques ethniques, qui empêche de connaître "la réalité du peuplement" de la France, dans un entretien au Journal du dimanche.
"Si on veut vraiment piloter la politique d?immigration comme je le préconise, permettre au Parlement de fixer chaque année le nombre de personnes que la France peut accueillir, ne pas subir une immigration qui ne viendrait que d?une seule région du monde, qui serait déconnectée de nos besoins économiques et nos possibilités sociales, il faut avoir la possibilité de savoir qui on accueille, ce que ces personnes deviennent, comment elles s?intègrent", déclare M. Fillon en développant une des propositions de son livre "Faire" à paraître lundi.
Pour savoir "quelle est la réalité du peuplement de notre pays", "il faut des statistiques +ethniques+". "C?est un tabou qu?il faut faire sauter. Sinon, on restera dans le non-dit, le refus de la réalité. C?est cela qui est en train de faire monter la colère de nos concitoyens, qui constatent un énorme décalage entre le discours sur les nécessités de l?intégration et la réalité de ce qu?ils vivent tous les jours", ajoute M. Fillon en assurant que ses propositions sur l'immigration sont "aujourd?hui reprises pour une large part par Les Républicains".
"80% des propositions qui ont été faites cette semaine par Nicolas Sarkozy" lors de sa "journée de travail" consacrée à l'immigration "sont dans le document que j?ai rendu public il y a un an sur l?immigration", lâche-t-il au passage.
Les statistiques ethniques, qui permettent de connaître le nombre et les origines des étrangers ou des personnes d'origines étrangères résidant dans l'Hexagone, ne sont pas autorisées en France et constituent un sujet sensible depuis de nombreuses années.
Le Conseil constitutionnel avait censuré en 2007 une mesure sur ces statistiques ethniques contenue dans le projet de loi sur l'immigration de Brice Hortefeux, en rappelant notamment que la Constitution établit "l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion".
- "Laïcité agressive" -
En février dernier, le président François Hollande avait évoqué l'idée de statistiques ethniques en jugeant que ce débat "n'apporterait rien".
Son Premier ministre Manuel Valls avait toutefois relancé le débat en évoquant, après les attentats de janvier, un "apartheid territorial, social et ethnique" plombant les quartiers sensibles, et en se disant en mars "prêt à avancer" sur une "réflexion" à ce propos, "dans un cadre constitutionnel".
Dans le JDD, M. Fillon développe aussi un autre thème abordé dans son livre, celui de "laïcité agressive", qui conduit, selon lui, "à exclure progressivement de la communauté nationale tous ceux qui affirment leur foi".
"On constate aujourd?hui que cette laïcité agressive remonte à la surface, notamment en raison des tensions avec une partie des musulmans, et elle conduit à des excès. Vouloir interdire toute forme de prosélytisme à l?intérieur de l?espace public, c?est ma conception de la laïcité ! Vouloir interdire toute manifestation religieuse en dehors du domicile, c?est de la laïcité agressive, quelle que soit la religion", souligne-t-il.
Cette "laïcité agressive" est désormais "tournée contre l?islam", selon lui. "J?ai été un de ceux qui ont été à l?origine de la loi interdisant le voile à l?école, mais je ne comprends pas la polémique qui s?est créée sur le port du voile à l?université. Je suis aussi réservé sur les tentatives d?interdiction des menus de substitution dans les cantines", insiste François Fillon.
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