Huit mois après l'élan qui a porté Syriza au pouvoir une première fois, le Premier ministre grec sortant Alexis Tsipras a tenté vendredi de regalvaniser ses troupes, se disant sûr, à la faveur de sondages favorables, d'un retour au pouvoir dimanche en forme de "message pour l'Europe".
"Nous luttons pour la grande victoire de la gauche en Grèce, pour que l'espoir se poursuive en Europe (et) le message de notre victoire sera envoyé à Pablo (Iglesias) en Espagne, à (Gerry) Adams en Irlande et à un Premier ministre progressiste au Portugal", a énoncé Alexis Tsipras devant une mer de supporters, parmi lesquels le chef du parti espagnol Podemos, à quelques mois d'élections dans ces pays.
C'était surtout sa dernière opportunité de séduire les dix millions d'électeurs grecs : dimanche, ils choisiront 300 députés, et un gouvernement, après la démission le 20 août de M. Tsipras, contesté par son aile gauche pour avoir signé un troisième plan d'aide internationale en cinq ans pour renflouer les caisses grecques de 86 milliards d'euros.
Les derniers sondages, indéchiffrables pendant des semaines, étaient plus clairement favorables à Syriza vendredi.
Les quatre publiés dans la journée donnaient Syriza vainqueur, avec 0,7 à 3 points d'avance sur la droite, toujours à l'intérieur de la marge d'erreur, toutefois.
De nombreux partisans de M. Tsipras ne savent plus s'il faut le traiter de traître ou le considérer comme raisonnable d'avoir cédé aux créanciers, UE et FMI, afin d'éviter au pays une sortie de l'euro rejeté par la grande majorité.
Dans la foule rassemblée vendredi à Athènes - dont la loi électorale interdit à la police de communiquer le nombre - le choix était clair.
Pour l'enseignant retraité Ilias Pappas, "le troisième sauvetage était inévitable, ceux qui disent le contraire racontent des mensonges". "Il n'y avait pas d'alternative", note Constantina, 30 ans, à laquelle Syriza inspire toujours "davantage d'espoir" que les autres partis.
M. Tsipras, 41 ans, a pour lui sa finesse politique, et une réputation d'honnêteté non entachée, face à son rival de Nouvelle Démocratie Vangelis Meïmarakis, 61 ans, qui traîne le boulet d'un parti à la détestable réputation de clientélisme, mais rassure, y compris les créanciers.
-'Si tu t'abstiens, pas de miracle' -
Les Grecs pourraient finalement hériter des deux. C'est le v?u de M. Meïmarakis, leader par intérim de la ND depuis deux mois, dont la personnalité discrète a permis au parti de se redresser spectaculairement après l'échec de janvier.
"Mon choix est de former une équipe nationale avec tous ceux qui veulent y participer", a-t-il encore lancé jeudi soir à Athènes.
M. Tsipras se prévaut, lui, de pouvoir atteindre la majorité absolue. Et il rejette par principe la main tendue de ND, assimilant une grande coalition gauche-droite à un assemblage "contre nature".
Jeudi, il appellé les indécis, pour beaucoup ses anciens électeurs, à voter en tweetant un dessin le représentant en Jésus-Christ, auréole et bras écartés, avec la mention : "Si tu t'abstiens, il n'y aura pas de miracle".
Le vainqueur des élections, qu'il soit ND ou Syriza - aucun autre parti grec ne peut y prétendre - devra dès lundi commencer à négocier des alliances pour obtenir une majorité solide au sein de la Vouli, le parlement grec, avec des partis comme le Pasok (socialiste) et le centriste To Potami. Tous ont voté le 14 août en faveur du nouveau plan de sauvetage financier , dont la mise en place sera la principale tâche du prochain gouvernement.
A commencer par une quinzaine de réformes considérées comme "prioritaires" par les créanciers internationaaux, à adopter "d'ici octobre 2015". Une potion amère composée de coupes dans les retraites, de relèvement de la TVA, de hausses d'impôt sur le revenu, et du durcissement de la fiscalité des agriculteurs.
Vendredi, l'ex-ministre des Finances Yanis Varoufakis a enfin fait connaître son choix, en faveur d'Unité populaire, le parti réunissant les frondeurs de Syriza, sous l'égide de l'ex-ministre de l'Energie Panayiotis Lafazanis. L'opposition de ces frondeurs à M. Tsipras avait provoqué ces législatives anticipées.
Ironie du sort, la quasi-totalité des sondages ne créditent pas ce parti des 3% de voix suffisants pour revenir au Parlement.
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