La Banque centrale européenne (BCE) s'est employée vendredi à rassurer sur sa capacité à soutenir encore plus la zone euro en cas de besoin, après avoir avoir été mise sous pression par le statu quo décidé par la Réserve fédérale américaine (Fed).
La banque centrale des Etats-Unis a finalement décidé de ne pas remonter ses taux directeurs, à cause du ralentissement observé en Chine et dans d'autres pays émergents.
Mais sans renchérissement du coup de l'argent outre-Atlantique, l'euro risque de s'apprécier par rapport au dollar. Il a atteint son plus haut niveau depuis trois semaines vendredi matin, à 1,1460 dollar.
Et qui dit euro fort, dit baisse du coût des biens importés et in fine ralentissement de la hausse des prix, que la BCE tente de redynamiser depuis des mois. Une mauvaise nouvelle alors que l'inflation est sortie du territoire négatif où elle avait plongé en janvier, mais reste très basse (+0,1% sur un an en août), très loin des 2% visés par la BCE.
Le cours de l'euro est "au premier plan de notre tableau de bord", a réagi vendredi à Paris Benoît Coeuré, membre du directoire de la BCE, même si l'institution de Francfort ne vise pas un niveau précis pour la monnaie européenne.
M. Coeuré a rappelé la "capacité à agir" de la BCE "en modulant" son fameux "QE", le gigantesque programme d'achats d'actifs qu'elle a lancé début mars pour injecter 1.140 milliards d'euros dans l'économie de la zone euro jusqu'en septembre 2016 au moins.
Car l'institution "a pour objectif constant de protéger les conditions monétaires dans la zone euro de tous les chocs internationaux, qui viennent des marchés financiers, qui viennent de la croissance des pays émergents, et qui viennent des décisions des autres grandes banques centrales", même si ces chocs sont pour l'instant jugés "temporaires", a-t-il ajouté.
"Il y a un peu plus de pression" sur les gardiens de l'euro du fait de la décision de la Fed, explique à l'AFP Michael Schubert, économiste chez Commerzbank. "La BCE dit toujours qu'elle ne cible pas (directement) le cours de l'euro, mais elle s'accommode volontiers d'un euro faible, car il a un effet immédiat sur l'inflation" et dope les exportations, remarque-t-il.
- Augmenter ou prolonger les achats d'actifs ? -
Des mesures supplémentaires pourraient se justifier si la Fed tarde trop à remonter ses taux et revient sur sa promesse d'une première hausse cette année, selon lui.
"L'inaction de la Fed augmente la probabilité que la BCE accroisse son intervention prochainement, mais nous n'en sommes pas encore là", estime Johannes Gareis, économiste chez Natixis.
"La prochaine publication de l'inflation en septembre fixera les termes du débat au sein de la BCE", d'autant plus que celle-ci a récemment révisé ses prévisions d'inflation et de croissance à la baisse, ajoute-t-il.
Les autres indicateurs d'activité pointent vers une reprise toujours en cours en Europe, ce qui semble laisser des marges de manoeuvre à l'institution.
Mais la BCE ne doit pas "attendre un resserrement de la politique monétaire aux Etats-Unis pour faire baisser l'euro", car "le soutien de l'euro faible à l'activité et à l'inflation commencera bientôt à se dissiper", jugent les analystes du courtier Capital Economics.
La banque centrale a déjà signalé début septembre être prête à agir davantage avec un premier ajustement technique: elle a rehaussé la limite de dette qu'elle peut racheter lors de chaque émission obligataire d'un membre de la zone euro.
Pour en faire plus, plusieurs moyens sont à sa disposition. Elle pourrait décider d'accélérer le rythme de ses achats d'actifs, que de nombreux analystes voient monter de 60 à 80 milliards d'euros par mois. Cette solution aurait "l'impact le plus immédiat", souligne M. Gareis.
Mais elle pourrait aussi simplement prolonger la durée de son QE au-delà de septembre 2016, ou élargir la palette de titres qu'elle s'autorise à racheter.
Si elle opte pour l'approfondissement de son soutien, une annonce en décembre serait "la plus probable", selon M. Gareis, lorsque la BCE doit publier ses prochaines prévisions économiques.
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