Manuel Valls a annoncé le déblocage de plusieurs centaines de millions d'euros pour l'accueil des réfugiés et ouvert la voie à un rétablissement temporaire des contrôles aux frontières, lors d'un débat sans vote, mercredi à l'Assemblée.
Dans un hémicycle qui n'a pas fait le plein de députés, le Premier ministre a défendu, d'un ton solennel, des "choix" du gouvernement, guidés par un "coeur intelligent, un coeur ferme", avant de laisser les groupes politiques s'exprimer. Le Sénat s'emparera du sujet à partir de 21H30, pour deux heures, là encore.
Manuel Valls a dit refuser le discours de ceux qui "nous disent : il faut tout fermer", comme celui de ceux qui disent, à l'inverse : "il faut tout ouvrir".
Il a annoncé d'un côté plusieurs centaines de millions d'euros supplémentaires pour l'accueil des réfugiés, mais aussi pour les sans domicile fixe, et de l'autre 900 créations de postes dans les forces de l'ordre dans le cadre de la lutte contre l'immigration irrégulière.
Et il a affirmé que la France n'"hésitera pas" à rétablir temporairement le contrôle aux frontières, comme elle l'a déjà fait à la frontière franco-italienne et comme vient de le faire l'Allemagne, "si nécessaire dans les prochains jours ou prochaines semaines".
80% des Français sont favorables à de tels contrôles, selon un sondage Elabe pour BFM TV.
Dans l'hémicycle, une fois n'est pas coutume, les différents groupes de gauche se sont rejoints sur la nécessité "morale" d'accueillir ceux qui fuient la guerre en Syrie et en Irak et sur la conviction que la France pouvait surmonter ce défi, comme dans le passé avec les espagnols fuyant le franquisme ou avec les boat-people vietnamiens et cambodgiens.
Ils ont aussi déploré la désunion européenne sur le sujet. "On ne s'exonère pas en Europe du devoir de solidarité" et "on ne peut pas d?un côté prendre les aides et l'argent et de l?autre refuser les hommes", a ainsi lancé le chef de file des députés PS Bruno Le Roux, disant avoir eu par exemple "honte des propos et décisions des autorités hongroises".
Faisant entendre des bémols, certains ont néanmoins glissé que la décision de François Hollande d'accueillir 24.000 réfugiés sur deux ans était "modeste" (Sergio Coronado, écologistes), voire "dérisoire" (André Chassaigne, Front de Gauche).
- Des 'pas' en direction du FN -
Du côté de l'UDI, Philippe Vigier a soutenu la décision "tardive mais courageuse" de François Hollande, tout en souhaitant des mécanismes pour "distinguer les réfugiés des clandestins" ou "une politique d'asile et une politique d'asile commune" en Europe alors que "l'espace Schengen est mort".
Les Républicains, qui avaient été dans un premier temps pris de court par la décision d'Angela Merkel d'accueillir largement les réfugiés en Allemagne et laissé apparaître leurs divergences, ont cherché à se ressouder autour de la "refondation" de Schengen, l'espace de libre circulation des biens et des personnes de l'Union européenne, dans un "Schengen 2".
Dans le sillage de la proposition de Nicolas Sarkozy, le principal parti d'opposition plaide aussi pour un statut de "réfugié de guerre", qui prendrait fin avec le retour à la paix.
"Monsieur le Premier ministre, c?est votre +père+ en politique, Michel Rocard, qui l?a dit lui-même: +Nous ne pouvons pas héberger toute la misère du monde+", a lancé l'oratrice du groupe LR Valérie Pécresse, une allusion incomplète à la phrase de M. Rocard qui a provoqué des protestations dans les rangs socialistes.
Coïncidence de calendrier, le parti Les Républicains a organisé ce mercredi une "journée de travail" sur l'immigration et va soumettre à ses adhérents onze questions par internet, par exemple pour savoir s'ils sont ou non "d'accord pour la suspension de Schengen" ou pour une diminution de "l'attractivité sociale de l'Europe".
De quoi alimenter des attaques socialistes contre l'ancien président de la République, accusé de faire des "pas en direction de l'extrême droite". Manuel Valls a rejeté devant les députés l'idée d'un statut de réfugié de guerre, qui "existe déjà", et "ceux qui pensent faire, par ce biais, échec au droit d'asile, se trompent".
Les positions de l'extrême droite, dont l'abolition de Schengen voulue par le FN, ont aussi suscité les critiques d'une gauche décidée à ne pas laisser "les démagogues" l'emporter sur des sujets "trop graves".
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nousA lire aussi
Envie d'afficher votre publicité ?
Contactez-nous
L'espace des commentaires est ouvert aux inscrits.
Connectez-vous ou créez un compte pour pouvoir commenter cet article.