Le mystère entourant la mort de Robert Boulin en 1979 va-t-il être levé? "On va pouvoir probablement s'approcher de la vérité", veut croire l'avocate de la famille de l'ancien ministre, après l'annonce jeudi de l'ouverture d'une enquête pour "enlèvement et séquestration".
Après un non-lieu rendu en 1991 et deux précédents refus de réouverture de l'enquête, la décision du parquet de Versailles a été accueillie comme "une grande victoire par la famille Boulin", a déclaré à l'AFP l'avocate, Me Marie Dosé. Les proches de l'ancien ministre ont toujours fait part de leur scepticisme à l'égard de la version officielle.
Cette dernière retient que l'ancien ministre Robert Boulin s'est suicidé à 59 ans dans la forêt de Rambouillet (Yvelines) après avoir été mis en cause dans une affaire immobilière à Ramatuelle (Var).
L'ouverture d'une nouvelle enquête, confiée à un juge d'instruction, pour "arrestation, enlèvement et séquestration suivi de mort ou assassinat", fait suite au dépôt de plainte, en mai dernier, de la fille de l'ancien ministre, Fabienne Boulin-Burgeat.
"Nous avons beaucoup d'actes à solliciter auprès du juge d'instruction. Raisonnablement, il est possible d'établir que Robert Boulin ne s'est pas suicidé. On pourra probablement s'approcher de la vérité et en terminer avec cette histoire de suicide", a commenté Me Dosé, selon qui "des témoins doivent être entendus".
- 'Sombre affaire' -
Dans une lettre fournie à la justice par la fille de Boulin, un témoin se dit prêt à déposer devant un juge et raconte que "le lundi 29 octobre 1979, alors" qu'il quittait "Montfort-L'Amaury pour (se) rendre à Saint-Léger", il avait reconnu dans une Peugeot "Boulin assis à la place du passager à l'avant, deux hommes étant avec lui dans le véhicule, l'un à la place du conducteur, l'autre à l'arrière".
"Quelques heures avant sa mort, Robert Boulin n'était pas seul dans son véhicule mais accompagné de deux inconnus, dont l'un conduisait. Ces deux personnes ne se sont jamais manifestées auprès de la justice. Robert Boulin n'avait pas de rendez-vous prévu. Cette liberté entravée peu avant sa mort est corroborée par d'autres éléments", avait estimé Me Marie Dosé lors du dépôt de plainte.
"La famille Boulin attend qu'un juge d'instruction indépendant soit saisi depuis plus d'une décennie et que toute la lumière soit enfin faite sur cette sombre affaire qui salit la Ve République", a souligné l'avocate.
L'ouverture d'une nouvelle instruction marque un rebondissement spectaculaire dans l'affaire, alors qu'en 2010 le parquet général de la cour d'appel de Paris avait refusé de rouvrir l'enquête pour homicide.
A l'époque, dans sa lettre de refus, le procureur général avait toutefois suggéré d'engager une nouvelle procédure afin de permettre une "nouvelle orientation de l'enquête" vers une qualification distincte, voie qu'a finalement choisie Fabienne Boulin-Burgeat.
Selon cette dernière, Robert Boulin a été assassiné parce qu'il disposait d'informations sur un financement politique occulte.
Pour conclure au suicide, la justice avait notamment retenu les huit lettres envoyées la veille de sa mort par le ministre à des médias et différentes personnalités, dont Jacques Chaban-Delmas, ancien Premier ministre.
Résistant devenu avocat, Robert Boulin avait entamé une carrière politique en 1958 en devenant député gaulliste de Gironde puis maire de Libourne un an plus tard, constamment réélu jusqu'à sa mort. Mais ce sont surtout ses longues fonctions ministérielles entamées en 1961 qui l'ont fait connaître du grand public, en occupant différents postes dans les gouvernements Debré, Pompidou, Couve de Murville, Chaban-Delmas, Messmer et Barre.
Nommé ministre du Travail par ce dernier en 1978, sa popularité avait alors nourri des rumeurs qui le désignaient comme "Premier ministrable" de Valéry Giscard d'Estaing.
Le 29 septembre, quittant le ministère du Travail, il dépose des dossiers confidentiels dans son appartement de Neuilly-sur-Seine puis part en voiture pour une destination inconnue.
Son corps sera retrouvé le lendemain matin dans 50 cm d'eau dans l'étang du Rompu à Saint-Léger-en-Yvelines (Yvelines). Officiellement, il se serait suicidé après avoir absorbé des barbituriques.
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