Sous une pluie battante, des dizaines de détenus amenés par la police hongroise s'activent pour achever au plus vite la construction d'une clôture controversée décidée par le gouvernement pour endiguer le flux de migrants traversant la frontière depuis la Serbie.
Dès les premières heures de la matinée, brumeuse et froide, sous forte surveillance policière, plusieurs dizaines de détenus vêtus de coupe-vents jaune fluo ont été conduits depuis la prison de la ville voisine de Szeged dans cette campagne morose et boueuse.
Pendant que certains déroulent des tapis de barbelés, d'autres finissent de fixer la ronce de fer à des poteaux métalliques, sur quatre mètres de hauteur. Ce premier mur sera ensuite complété par un autre mur de barbelés de la même hauteur.
Cette partie de la clôture court sur 400 mètres, le long d'une voie ferrée qui a été empruntée par des milliers de migrants entrés en Hongrie depuis la Serbie ces dernières semaines, près de Röszke.
"Ca doit être fini aujourd?hui", explique un policier qui se dit "épuisé" par les arrivées massives de migrants, tandis que de nouveaux petits groupes, principalement venus de Syrie et d'Afghanistan, continuent de franchir la voie ferrée à quelques pas.
"A partir du 15 septembre (date de l'entrée en vigueur d'une nouvelle loi renforçant les mesures antimigrants), toute personne qui franchira cette clôture sera emprisonnée", rappelle le policier, le visage creusé de fatigue.
Face à lui, un mirador hongrois semble comme figé dans une autre époque, celle de la Guerre froide.
- Accélération -
Le Premier ministre populiste Viktor Orban a ordonné une accélération des travaux de renforcement de la clôture destinée à fermer hermétiquement les 175 kilomètres de frontière avec la Serbie, par où transite une grande majorité de ces migrants tentant de gagner l'Europe occidentale.
"Tout le monde doit se tenir prêt à travailler intensément ces prochaines semaines", a-t-il souligné récemment, évoquant un renfort de l'armée. Mais sans préciser que des prisonniers seraient réquisitionnés à cette fin.
Critiqués notamment par le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius, qui a jugé que la Hongrie ne "respecte pas les valeurs communes de l'Europe", les travaux ont pris du retard.
Un contretemps qui a apparemment coûté son poste lundi au ministre hongrois de la Défense, Csaba Hende. M. Orban n'est "pas satisfait" et "la démission de Csaba Hende est liée à cela", a affirmé mardi Lajos Kosa, un proche du dirigeant.
Plus de 175.000 migrants ont franchi illégalement la frontière hongroise depuis le début de l'année, dont 3.321 pendant la seule journée de mercredi, un nouveau record, selon Budapest.
La grande majorité d'entre eux continuent ensuite leur route vers l'Allemagne via l'Autriche. Quelque 20.000 migrants bloqués en Hongrie sont arrivés en Allemagne le week-end dernier, après que Vienne a accepté d'en faciliter le transit à titre "temporaire".
- Indifférence -
Jeudi, les migrants nouveaux venus semblaient comme indifférents à ces travaux menés par des détenus. A l'abri de la pluie, dans une clairière, un groupe d'Afghans partage un maigre repas.
D'autres continuent de converger vers le centre de transit à quelques mètres de là, dans l'espoir de pouvoir se mettre à l'abri de la pluie sous des tentes de fortune.
Des Syriens errent dans cette zone sinistrée par les nombreux passages de ces dernières semaines, à la recherche de nourriture et d'informations sur les moyens de gagner Budapest, à 175 km, et de là tenter de poursuivre leur périple.
Certains migrants attendent, exténués, dans une longue file de pouvoir monter dans un bus. Montent en priorité les familles avec enfants, les chaussures gorgées de boue.
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