Les journalistes soupçonnés d'avoir voulu faire chanter le Maroc ont contesté en justice la validité des enregistrements utilisés pour leur mise en cause, a appris mercredi l'AFP de sources proches du dossier.
Catherine Graciet, 41 ans, et Eric Laurent, 68 ans, sont soupçonnés d'avoir voulu extorquer de l'argent au Maroc en échange de l'abandon d'un livre sur le Royaume, censé contenir des révélations gênantes.
Ils ont été interpellés le 27 août, en possession de 80.000 euros en liquide, au sortir d'une réunion avec un émissaire du Maroc, enregistrée à leur insu par leur interlocuteur. Cela avait été le cas pour deux rencontres précédentes, entre Eric Laurent et cet émissaire, l'avocat Hicham Naciri.
Dans des requêtes déposées lundi devant la cour d'appel de Paris et dont l'AFP a eu connaissance, les deux journalistes demandent l'annulation des enregistrements des rencontres des 21 et 27 août, et de leurs mises en examen.
Selon eux, ces écoutes participent d'une "administration déloyale de la preuve", car elles ont été réalisées par Hicham Naciri, avec l'aval du parquet de Paris pour la première, de la juge d'instruction pour la seconde, alors même que la justice n'était pas en mesure de les ordonner pour des raisons de droit.
"Ce stratagème () a permis" aux enquêteurs "de contourner et d?éluder les dispositions pourtant très strictes du code de procédure pénale en matière de sonorisations" et "ne constitue rien d?autre qu?un contournement illégal" de la loi, selon la requête d'Eric Laurent, déposée par son avocat Me William Bourdon.
"L?avocat Naciri, qui a déjà enregistré (un) premier entretien, prévient les magistrats et policiers du second puis du troisième rendez-vous", relève de son coté Catherine Graciet, représentée par Me Eric Moutet.
La journaliste note dans sa demande que l'ultime rencontre, la seule à laquelle elle participe, se déroule "sous le contrôle permanent des policiers".
Selon la requête d'Eric Laurent, dans la réalisation de ces enregistrements, la justice "est un chef d?orchestre", elle "est intervenue directement dans la confection de la preuve apportée par Me Naciri."
Dans sa demande, le journaliste affirme que c'est l'émissaire marocain qui, "le premier, évoque la possibilité d?une négociation financière".
Savoir qui a initié ce qui a été décrit par Eric Laurent comme une "transaction" lors de la première rencontre du 11 août, est un point crucial de l'enquête.
Dans la requête de Catherine Graciet, il est relevé que Me Naciri a concédé que ce premier enregistrement avait "été +travaillé+ afin d?en améliorer la qualité". Et l'expert sollicité a indiqué que "sous réserve d?examens techniques plus approfondis", le fichier avait "pu avoir été modifié avec des moyens techniques élaborés".
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