Ils ont roulé pendant des heures avec leurs tracteurs, lancé des pétards, allumé des brasiers jusque sous les fenêtres des institutions européennes et s'en retournent, pour certains, les yeux rougis par les gaz lacrymogène ou les vêtements trempés par les canons à eau de la police: lundi, les agriculteurs ont crié leur colère à Bruxelles.
La police belge, qui s'était déployée en force, a compté quelque 7.000 manifestants et plus de 1.400 tracteurs, qui ont congestionné pendant toute la journée des grands axes de la capitale belge en particulier dans le quartier Schuman, qui abrite le siège de la Commission et du Conseil européen.
Leur objectif: tirer la sonnette d'alarme et exhorter les dirigeants européens à trouver une issue à la crise qui touche plusieurs filières agricoles, en particulier celles de la production laitière et de la viande porcine.
En fin de journée, alors que les derniers tracteurs reprenaient la route de leurs fermes, le rond-point Schuman portait les stigmates du mécontentement paysan: un sol détrempé par les jets de canon à eau de la police, du mobilier urbain et des plantations d'ornement incendiés par les manifestants, achevant de se consumer. Quelques arbres déracinés, des poubelles arrachées
Un vache en plastique bleu et frappée des étoiles jaunes du drapeau européen, grandeur nature, pendait corde au cou du haut d'un bulldozer.
Entre les manifestants et les bâtiments du Conseil, où se sont consultés tout l'après-midi les ministres européens de l'Agriculture, des dizaines de policiers belges, renforcés exceptionnellement par des collègues néerlandais, attendaient, bouclier au bras, le départ des derniers protestataires.
Pendant plusieurs heures, les forces de l'ordre ont encaissé des jets de projectiles divers: bouteilles, pétards et fusées, ?ufs ou pavés
Quatre policiers ont été blessés, dont un a été hospitalisé, selon la télévision.
Peu avant la fin du rassemblement, la police a eu recours à un usage intensif de gaz lacrymogène.
Partis à l'aube de Belgique, de France et d'Allemagne, des colonnes de tracteurs étaient arrivés en début de matinée à Bruxelles, répondant à l'appel de syndicats agricoles européens.
- 'Nous on crève' -
"Je suis Eleveur", indiquait une pancarte portée par un jeune manifestant, en écho aux "Je suis Charlie" qui avaient fleuri après les attentats de Paris en janvier.
Rémy Hulin, un éleveur à la retraite, est venu du Calvados (ouest de la France) avec une potence suspendant un mannequin habillé d'une salopette d'agriculteur. "Il y a des centaines de suicidés dans l'élevage, c'est le résultat d'une politique agricole désastreuse", a-t-il expliqué à l'AFP.
"Tous les matins, on se lève et on perd de l'argent à traire nos vaches", a protesté Jacky, un autre agriculteur venu lui aussi du Calvados avec près de 100 membres de la Coordination rurale.
Des engins agricoles ont occupé pendant une bonne partie de la journée plusieurs grands axes en rangs de trois ou quatre, sur des centaines de mètres en direction du centre-ville. Les dernier ont quitté Bruxelles en début de soirée, après un appel à la dispersion lancé par les organisateurs.
"Le lait est payé moins cher qu'il nous coûte à produire, il nous faudrait un prix de base de 350 à 400 euros (la tonne) alors qu'on est payé 280 euros actuellement", a déploré le producteur laitier français.
"Quelle nourriture donnerez-vous à vos enfants ?" "Europe veux-tu encore de nous ?", pouvait-on lire sur des pancartes et bannières. "On vous nourrit, nous on crève". "Passant, souviens-toi de l'agriculture équitable et nourricière aujourd'hui décimée par la mondialisation", lisait-on sur d'autres.
L'effondrement des cours du lait et des viandes bovines et porcines a provoqué tout l'été une fronde des agriculteurs européens, du Royaume-Uni à l'Allemagne, en passant par la France.
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