Les conclusions d'une enquête indépendante sur la disparition de 43 étudiants enlevés l'an dernier dans le sud du Mexique contredisent la version des autorités selon laquelle les jeunes ont été incinérés dans une décharge, relançant l'indignation autour de cette affaire.
"Il n'y a aucune preuve qui soutienne l'hypothèse présentée sur la base de témoignages", ce qui implique que les recherches des disparus doivent continuer, est-il écrit dans un rapport présenté dimanche devant la presse à Mexico.
Après six mois d'enquête et sur près de 500 pages, un Groupe international d'enquêteurs indépendants (GIEI), formé par la Commission interaméricaine des droits de l'Homme, met en avant des éléments qui risquent d'affaiblir encore un peu plus le gouvernement du président Enrique Pena Nieto, dont la popularité avait chuté après la disparition des étudiants.
Affirmant détenir une "vérité historique", le parquet mexicain avait conclu l'an passé que, dans la nuit du 26 au 27 septembre 2014, des dizaines d'étudiants de l'école normale d'Ayotzinapa (Etat de Guerrero, sud), qui s'étaient emparés de bus pour manifester, avaient été attaqués par des policiers de la commune d'Iguala en cheville avec le crime organisé.
Les étudiants auraient ensuite été livrés par les policiers au cartel des Guerreros Unidos, qui les suspectaient d'appartenir à un groupe rival. Puis, toujours selon le procureur, citant les confessions d'un membre du cartel, les étudiants avaient été tués puis brûlés durant 14 heures avant que leurs cendres ne soient dispersées dans une rivière.
Selon un professeur de l'Université de Queensland en Australie, Jose Torero, membre du GIEI, une telle crémation aurait en réalité nécessité 60 heures et brûlé la végétation alentour, or seules des traces de petits feux ont été trouvées sur place.
Elle aurait par ailleurs nécessité 30 tonnes de bois ou 13 tonnes de pneus.
Il n'y a pas de trace de feu correspondant "ne serait-ce qu'à l'incinération d'un seul corps", écrit M. Torero dans le rapport.
Seules les traces ADN d'un étudiant avaient pu être identifiées sur la base de restes dans un sac retrouvé dans la rivière.
- Inaction des forces fédérales -
Le rapport souligne encore que la police fédérale et l'armée surveillaient les agissements de ces étudiants provenant d'une école connue pour son militantisme de gauche.
Les experts critiquent l'inaction de ces agents alors qu'ils ont assisté aux attaques et notent que de nombreux blessés n'ont pas été secourus, ce qui "dans certains cas a probablement précipité la mort".
Ils réclament une enquête sur l'attitude des forces fédérales.
Les enquêteurs demandent également au procureur de déterminer si les étudiants ont été visés parce qu'ils pourraient avoir volé un autobus servant habituellement à transporter de l'héroïne, dans cet Etat situé sur une des routes de la drogue.
Ils regrettent "de ne pouvoir apporter aux familles, au gouvernement, à la société mexicaine et au monde entier une conclusion définitive sur ce qui est arrivé aux 43 étudiants disparus".
Pour Amnesty International, ce rapport montre "l'incompétence absolue et le manque de volonté du gouvernement de trouver et de punir les responsables".
Les familles des disparus ont demandé une nouvelle enquête et une entrevue avec le président Pena Nieto.
C'était "un crime d'Etat et l'Etat doit payer pour les conséquences de ses mensonges, de ses erreurs", a déclaré le porte-parole des parents des disparus, Felipe de la Cruz.
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