Les Guatémaltèques ont placé dimanche un acteur comique sans expérience politique en tête du premier tour de l'élection présidentielle, espérant secouer un système rongé par la corruption, avec un ex-dirigeant en garde à vue.
Selon des résultats officiels portant sur 71,64% des suffrages, le comédien et animateur de télévision Jimmy Morales, 46 ans, candidat du parti FCN-Nacion (droite), totalise 26,58% des voix.
L'incertitude demeure sur son adversaire au second tour le 25 octobre, entre l'homme d'affaires millionnaire Manuel Baldizon, 45 ans, à 17,98%, porté par le parti Liberté démocratique (Lider, droite), et l'ex-Première dame Sandra Torres, 59 ans, soutenue par l'Union nationale de l'espoir (UNE, social-démocrate), à 17,13%.
Selon le Tribunal suprême électoral (TSE), la participation, autour de 70%, avoisine celle de 2011.
Le vote s'est déroulé dans le calme et a déjoué les craintes d'abstention liées au climat d'exaspération historique de la population.
Mais les électeurs ont trouvé le moyen d'exprimer leur indignation en portant leur choix sur un candidat atypique, contre-pied d'une semaine rocambolesque, de la démission du président conservateur Otto Pérez à son placement en garde à vue sur des soupçons de corruption.
Connu pour son personnage naïf de "Neto", au cinéma, qui devient président par accident, Jimmy Morales a percé de manière spectaculaire ces derniers mois sur la scène politique nationale, mais sans programme concret.
"Dans cette conjoncture de remise en cause de l'éthique de la classe politique, Jimmy surgit comme un phénomène nouveau, sans passé dans les partis politiques ou à des postes publics", explique l'analyste politique Cecil de Leon.
"Nous faisons partie de la population lasse, qui ne veut plus de la même chose", clamait dimanche soir le candidat aux journalistes.
Manuel Baldizon, avocat ayant fait fortune dans le tourisme, le transport et l'immobilier, a longtemps été favori des sondages.
Mais les scandales de corruption et de blanchiment d'argent touchant six députés de son parti et son propre candidat à la vice-présidence ont entraîné son rejet par une partie de la population.
- 'Vote de punition' -
"Au Guatemala, nous avons l'habitude d'exprimer un vote de punition, donc c'est un vote anti-Baldizon et anti-Sandra, qui représentent la classe politique normale", estime Sandino Asturia, analyste du Centre d'études du Guatemala.
Mais "le phénomène Jimmy est une coquille vide, sans structure de parti solide", prévient-il après ce scrutin qui désignait aussi 158 députés et 338 maires.
Alors que 53,7% de la population vit sous le seuil de pauvreté, la révélation en avril du scandale de corruption touchant les plus hauts niveaux de l'Etat avait outré les Guatémaltèques, qui supportent au jour le jour un système public de santé et d'éducation en pleine débâcle, faute de moyens.
Elle avait déclenché une mobilisation citoyenne sans précédent mais toujours dans le calme, dans un pays de 15,8 millions d'habitants qui est pourtant l'un des plus violents au monde.
Le Guatemala "est un exemple pour l'Amérique latine" en protestant de manière "pacifique", a salué le chef de la mission d'observation électorale de l'Organisation des Etats américains (OEA), Juan Pablo Corlazzoli.
La chute de M. Pérez, ces derniers jours, a été accueillie par des scènes de liesse populaire.
Cet ex-général de 64 ans, qui passe un long week-end à la prison militaire de Matamoros, en garde à vue, retrouvera mardi le juge, qui prononcera son éventuel placement en détention provisoire.
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