Les Guatémaltèques votaient dimanche pour désigner leur nouveau président dans un climat d'exaspération inédit face à la corruption, après une semaine historique qui a vu leur dirigeant démissionner puis être placé en garde à vue.
Le président du Tribunal suprême électoral (TSE), Rudy Pineda, a déclaré ouverts les 2.700 bureaux de vote, qui fermeront à 18H00 (00H00 GMT). Les premiers résultats ne sont pas attendus avant 21H00 (03H00 GMT lundi).
Après avoir déposé son bulletin dans l'urne, chacun des 7,5 millions d'électeurs doit tremper son index dans de l'encre indélébile, ce qui l'empêche de voter plusieurs fois, dans ce pays où l'achat de voix est monnaie courante.
A l'école Campo Verde, dans le sud de la capitale, des volontaires aux t-shirts bleus orientaient les électeurs dans une ambiance animée, au milieu des vendeurs de nourriture, de noix de coco et de jus de fruits.
"J'espère qu'avec ce qui s'est passé (cette semaine, ndlr), l'élection serve à ce que ceux que nous choisirons nous surprennent avec des choses bénéfiques pour le peuple, au lieu de nous surprendre avec la corruption", déclarait à l'AFP Carla Pérez, 36 ans, après avoir voté.
"La corruption n'est pas nouvelle", confiait Mario Porras, 75 ans, venu tôt avec son fils Carlos. "Mais maintenant que c'est au grand jour, les nouvelles autorités savent qu'elles seront sous observation, même si les politiques cherchent toujours un moyen d'échapper aux contrôles".
Le favori à la présidentielle - dont le second tour aura lieu le 25 octobre -, est l'humoriste Jimmy Morales, candidat de droite sans expérience politique, crédité de 25% des suffrages dans un sondage publié jeudi, suivi de Manuel Baldizon (droite, 22,9%) et de la social-démocrate Sandra Torres, ex-Première dame (18,4%).
Les Guatémaltèques choisissent aussi 158 députés et 338 maires.
Le scrutin survient au terme d'une semaine rocambolesque qui a vu le président conservateur Otto Pérez, accusé de diriger un réseau de corruption au sein des douanes, perdre son immunité, démissionner puis être placé en garde à vue jusqu'à mardi.
Il ne s'agit que des derniers épisodes d'un feuilleton qui dure depuis avril, avec d'un côté, le travail d'enquête conjoint du parquet et de la Commission de l'ONU contre l'impunité (Cicig), révélant plusieurs scandales de corruption, et de l'autre, un mouvement populaire sans précédent.
Avec des manifestations pacifiques organisées chaque samedi pour dénoncer la corruption, "le Guatemala donne un exemple mondial de mobilisation citoyenne", a salué José Edgardo Cal Montoya, historien à l'université San Carlos.
- 'Pas d'amnésie' -
Les manifestants exigent désormais une refonte du système politique pour le purger de la corruption, source de 50% du financement des partis selon l'Institut centraméricain d'études fiscales (Icefi).
Mais ces derniers mois, tous les recours pour repousser le scrutin, déposés par des partis minoritaires et des collectifs citoyens, ont été rejetés par le tribunal électoral.
Et les demandes de réformes, pour empêcher la réélection des maires et députés, modifier la gestion des partis et permettre le vote à l'étranger (1,5 million de Guatémaltèques vivent notamment aux Etats-Unis, pour une population de 15,8 millions), n'ont pas été entendues.
Samedi, une "marche funèbre" a réuni dans la capitale plusieurs centaines d'habitants, portant un cercueil et des habits de deuil face à un scrutin "mort-né".
"Les citoyens disent qu'ils ne veulent pas d'élections dans ces conditions-là, car cela va être la même chose", observe Marie-Dominik Langlois, chercheuse à l'université du Québec à Montréal.
Face aux craintes d'une forte abstention, voire d'actes de violence dans ce pays pauvre miné par le crime organisé, les appels au vote et au calme se sont multipliés, venant notamment de l'ONU.
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