Face à l'afflux de demandeurs d'asile, les appels se multiplient pour que les Européens harmonisent enfin leurs règles d'attribution du droit d'asile. Le système actuel apparaît déséquilibré et à bout de souffle.
- UN SOCLE DE REGLES EUROPEENNES -
L'accélération de la crise migratoire a mis la question de l'harmonisation européenne sur le devant de la scène, mais le chantier a été lancé depuis la fin des années 1990, et a conduit à un socle de règles communes.
Ont été notamment fixés les délais d'examen des demandes d'asile. "La dignité humaine doit être préservée", souligne une porte-parole de la Commission européenne, citant l'obligation pour les Etats d'examiner sous six mois les demandes déposées. Après neuf mois, "l'accès au marché du travail doit être facilité", rappelle-t-elle. Les Etats ont aussi l'obligation de prendre en compte les besoins spécifiques des mineurs.
Le "règlement Dublin" (2003) constitue l'une des clés de voûte des règles communes: il définit quel Etat membre doit examiner une demande d'asile et prévoit le transfert d'un demandeur d'asile vers cet Etat membre, en général celui par lequel il est entré dans l'UE. L'objectif est d'empêcher qu'un demandeur d'asile ne présente des demandes dans plusieurs Etats.
- LA 'LOTERIE' DU DROIT D'ASILE -
Les efforts d'harmonisation se heurtent à la volonté des Etats de garder la main sur leur politique du droit d'asile, le souci de maîtriser les flux migratoires prenant le pas sur la volonté affichée de protéger des personnes en danger.
Demander l'asile, comme l'ont fait en 2014 quelque 626.000 personnes, relève d'une vraie "loterie" suivant le pays où la demande est déposée, déplore le Conseil européen pour les réfugiés et les exilés (ECRE), un réseau d'ONG.
"Les conditions sont encore très différentes d'un pays à l'autre", abonde le chercheur Matthieu Tardis, spécialiste des migrations à l'Ifri. Pour les ressortissants somaliens demandeurs d'asile, en 2013, le taux de reconnaissance s'est par exemple élevé à 17% en France et de 38% en Suède, alors qu'il a atteint 90% aux Pays-Bas et 96% en Italie, souligne l'expert.
Par ailleurs, les différents pays n'offrent pas le même accueil aux demandeurs d'asile, certains proposant un hébergement systématique tandis que d'autres privilégient la détention, voire ne prévoient rien.
- LES RAISONS DU BLOCAGE -
Les pays du Nord et de l'Ouest, qui offrent souvent de meilleures perspectives d'intégration, soulignent qu'ils concentrent la plupart des demandes. Les pays du Sud, par fatalité géographique, estiment que le "système Dublin" fait peser sur eux de trop lourdes obligations.
Certains appellent à davantage de solidarité entre Etats, tandis que d'autres insistent pour signifier aux migrants que l'Europe ne pourra pas les accueillir. La sortie du Premier ministre hongrois Viktor Orban, qui a parlé de "problème allemand" à propos de l'afflux de demandeurs d'asile transitant par son pays, illustre ces divergences. La Hongrie, comme l'Autriche, reprochent à Berlin d'avoir créé un appel d'air en accordant un traitement de faveur aux Syriens.
"Ce qui apparaît de manière assez flagrante ces derniers mois, c'est l'absence de confiance mutuelle entre les Etats européens", observe M. Tardis.
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