Le Parlement du Guatemala a accepté jeudi la démission du président Otto Pérez, au moment même où il comparaissait au tribunal sur des soupçons de corruption, dans un climat de liesse populaire à trois jours des élections.
Les 116 députés présents (sur 158 au total) ont tous voté en faveur puis l'Assemblée a convoqué pour 14H00 (20H00 GMT) une session d'urgence au cours de laquelle le vice-président, Alejandro Maldonado, prêtera serment.
M. Maldonado, avocat et notaire de 79 ans, était jusqu'en mai l'un des cinq membres de la Cour constitutionnelle, avant d'être appelé à la vice-présidence pour remplacer Roxana Baldetti, démissionnaire puis placée en détention provisoire dans le cadre du même dossier que celui dans lequel est impliqué Otto Pérez.
Ce dernier est accusé par le parquet et une commission de l'ONU contre l'impunité (Cicig) d'avoir dirigé un système de corruption au sein des douanes via lequel des fonctionnaires touchaient des pots-de-vin pour exonérer de taxes certaines importations.
Le dirigeant conservateur, au pouvoir depuis 2012, est arrivé vers 08H45 (14H45 GMT) pour être entendu par le juge Miguel Angel Galvez, qui a émis mercredi soir un mandat d'arrêt contre lui, précipitant sa démission.
Portant un costume sombre et une cravate rouge, l'air préoccupé, l'ex-général de 64 ans a assuré sur une radio locale qu'il "affronter(ait) avec courage (la justice), car (il n'a) rien fait de mal".
Durant l'audience, il a paru gêné, baissant les yeux quand l'accusation a diffusé plusieurs enregistrements téléphoniques le mettant en cause.
Le parquet a d'ores et déjà annoncé qu'il demanderait son placement en détention provisoire.
Le procureur Antonio Morales l'a accusé de "faire partie d'une bande criminelle qui opérait depuis mai 2014 avec l'objectif de voler l'Etat".
Il a estimé que le dirigeant a pu recevoir 3,7 millions de dollars en pots-de vin, tandis que Mme Baldetti est elle soupçonnée d'avoir touché 3,8 millions, notamment via des chèques libellés à son nom.
L'audition du président, deux jours après avoir été privé de son immunité par un vote du Parlement - mesure inédite dans l'histoire du Guatemala -, survient à trois jours seulement du premier tour des élections présidentielle, législatives et municipales de dimanche.
M. Pérez n'était pas candidat, la Constitution n'autorisant qu'un seul mandat.
Dès l'annonce, dans la nuit, de sa démission, des dizaines de Guatémaltèques ont accouru devant la Cour suprême, au son de sifflets et scandant "Otto, voleur, tu vas aller à Pavon", l'une des principales prisons du Guatemala.
- Un humoriste en tête des sondages -
Malgré les nombreux appels à la démission, Otto Pérez avait répété sans relâche, ces dernières semaines, qu'il ne quitterait pas son poste avant la fin de son mandat le 14 janvier prochain.
Il a finalement cédé à une mobilisation populaire sans précédent dans ce pays pauvre d'Amérique centrale, avec des manifestations pacifiques organisées chaque semaine depuis avril, quand le scandale a éclaté.
Les manifestants réclament le report du scrutin, souhaitant d'abord une vaste refonte du système politique pour le purger d'une corruption endémique.
Signe d'un renversement de situation, l'humoriste Jimmy Morales, candidat pour un parti de droite et sans expérience politique, est désormais en tête des intentions de vote à la présidentielle, selon un sondage publié jeudi.
A 46 ans, il est crédité de 25% des suffrages, dépassant Manuel Baldizon (droite, 22,9%), le favori jusqu'alors, et la sociale-démocrate Sandra Torres, ex-première dame, avec 18,4%, selon l'enquête effectuée quelques jours avant la démission du président.
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