Après des mois d'intense pression populaire et à quelques heures d'une probable destitution sur des soupçons de corruption, le président du Guatemala Otto Pérez a finalement démissionné, bouleversant le paysage politique du pays à quelques jours des élections.
Le dirigeant conservateur, au pouvoir depuis 2012, a pris cette décision afin d'affronter "de manière individuelle la procédure menée à son encontre", a annoncé jeudi son porte-parole dans un communiqué.
Otto Pérez est accusé par le parquet et une commission de l'ONU contre l'impunité (Cicig) d'avoir dirigé un système de corruption au sein des douanes, grâce auquel des fonctionnaires touchaient des pots-de-vin pour exonérer de taxes certaines importations.
C'est théoriquement son vice-président, Alejandro Maldonado, qui doit désormais prendre les rênes du pays, à trois jours seulement du premier tour des élections générales dimanche. M. Pérez n'était pas candidat, la Constitution n'autorisant qu'un seul mandat.
Cette décision survient quelques heures après le lancement d'un mandat d'arrêt par la justice.
"Le mandat d'arrêt à l'encontre du président a été autorisé" par le juge Miguel Angel Galvez, en charge du dossier, avait annoncé aux journalistes Julia Barrera, porte-parole du parquet.
S'étant engagé à collaborer avec la justice, M. Pérez peut toutefois se présenter librement devant le juge, sans y être amené par la force.
"Il va se présenter" jeudi, avait indiqué la veille au soir son avocat, Me César Calderon. Selon les médias locaux, il devait le faire à 08H00 (14H00 GMT).
Selon Julia Barrera, à son arrivée devant le juge débutera "une audience de première déclaration" et le parquet demandera son placement en détention provisoire, une requête qui, si elle était approuvée par le juge, aurait signifié la destitution automatique de M. Pérez.
Otto Pérez, un général en retraite de 64 ans, avait été privé mardi de son immunité par un vote à l'unanimité du Parlement, une mesure inédite dans l'histoire du Guatemala et qui a suscité la liesse de la population.
Dès mardi soir, la justice lui avait interdit de sortir du territoire et, mercredi, la Cour constitutionnelle a rejeté ses recours pour suspendre la procédure.
Dans ce dossier, son ancienne vice-présidente Roxana Baldetti, démissionnaire en mai et également poursuivie, est déjà en détention provisoire.
- Mobilisation sans précédent -
Malgré les nombreux appels à sa démission, Otto Pérez avait répété sans relâche, ces dernières semaines, qu'il ne quitterait pas son poste avant la fin de son mandat.
Il a finalement cédé à une mobilisation populaire sans précédent dans ce pays pauvre d'Amérique centrale, avec des manifestations pacifiques organisées chaque semaine depuis avril, quand le scandale a éclaté.
Mercredi, plusieurs habitants interrogés par l'AFP ne cachaient pas leur joie à l'annonce du mandat d'arrêt émis : "Je crois que c'est juste, et pourvu que la justice soit vraiment mise en pratique cette fois", confiait par exemple Eduard Yuman, un cuisinier.
Les manifestants réclamaient aussi le report du scrutin, souhaitant d'abord une vaste refonte du système politique pour le purger de la corruption endémique.
Ce contexte atypique a amené mercredi le bureau du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme (HCDH) au Guatemala à mettre en garde contre "de possibles manifestations violentes" le jour du vote.
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