L'enregistrement des entretiens avec les journalistes français soupçonnés d'avoir fait chanter le royaume du Maroc constitue un "contournement de procédure", s'est insurgé dimanche un avocat de la défense, dans une affaire qui relève du "mauvais film", selon le chef de la diplomatie française.
Eric Laurent et Catherine Graciet sont soupçonnés d'avoir tenté de monnayer l'abandon d'un projet de livre sur le roi du Maroc Mohammed VI contenant des informations supposées gênantes en échange d'argent. Plusieurs rencontres ont eu lieu pour en parler avec un représentant du royaume chérifien, un avocat marocain, le tout sous la surveillance des policiers alertés par Rabat.
Les deux journalistes ont été mis en examen dans la nuit de vendredi à samedi pour chantage et extorsion de fonds, et placés sous contrôle judiciaire.
Au cours de l'une de ces rencontres, Eric Laurent est notamment enregistré par l'avocat en train de réclamer "trois millions d'euros", selon des extraits de ces écoutes publiées par le Journal du Dimanche.
L'avocat marocain se serait chargé lui-même des enregistrements, y compris une fois l'enquête lancée, en lieu et place des policiers, en raison des limites fixées par la loi française à l'écoute des journalistes au nom de la préservation de leurs sources, selon le JDD.
Un situation qui indigne Me Eric Moutet: pour l'avocat de Catherine Graciet, "c'est un contournement de procédure. Quand on demande à un avocat de faire des écoutes sauvages à la place de la police, il y a un problème".
"Je ne peux que dénoncer cette pratique de recollement des preuves se faisant de manière aussi déloyale, voire totalement illégale", affirme-t-il.
L'avocat se "réserve donc la possibilité de déposer toute requête en nullité de la procédure relative à ces écoutes sauvages". Sollicité par l'AFP, le parquet de Paris n'a pas souhaité faire de commentaire dans l'immédiat.
Pour le conseil d'Eric Laurent, Me William Bourdon, Eric Laurent et Catherine Graciet sont tombés dans un "traquenard", une "opération politique" de Rabat contre deux journalistes "dont l'enquête est de nature à révéler de lourds secrets".
Cette affaire rocambolesque intervient alors que les relations, souvent passionnées, entre le royaume chérifien et la France connaissent une embellie, après plus d'un an de brouille provoquée par une autre affaire judiciaire, une enquête française portant sur des accusations de torture à l'encontre du chef du contre-espionnage marocain.
Elle relève en tout cas du "mauvais film", a jugé dimanche Laurent Fabius. "Cela ne secoue pas du tout les relations entre nos deux pays (), c'est une affaire de droit commun", a constaté le ministre des Affaires étrangères. "La coopération marche très bien, on a eu l'an dernier une difficulté mais les choses sont rentrées dans l'ordre".
Pour sceller cette réconciliation, François Hollande doit effectuer une visite officielle au Maroc à la mi-septembre.
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