L'accord sur un troisième plan d'aide international à la Grèce sort le pays d'une zone de turbulences financières extrêmes mais lui impose une cadence de réformes sans relâche alors que la majorité d'Alexis Tsipras n'a jamais été aussi divisée.
En plus du soulagement manifesté après six longs mois de négociations chaotiques, le ministre des Finances Euclide Tsakalotos a fait entendre vendredi soir une petite musique nouvelle de la part du gouvernement grec, estimant que le nouveau plan d'aide adoubé par les ministres des Finances de la zone euro offre au pays de "nombreuses opportunités".
Alors que le Premier ministre Alexis Tsipras n'a cessé de répéter qu'il ne croyait pas à l'accord qu'il avait signé, le chef de file des négociateurs grecs a décidé de voir le verre à moitié plein: "L'accord fait avancer la Grèce car il rend son système financier plus stable à partir de maintenant", a-t-il encore assuré.
Il croit même que la longue feuille de route de mesures budgétaires et de réformes que le pays a acceptée en échange de l'aide "offre l'opportunité de transformer le secteur public, de s'attaquer à la corruption, à l'évasion fiscale et à de nombreuses réformes structurelles importantes".
La Grèce avait urgemment besoin de l'engagement européen sur de nouveaux prêts pouvant aller jusqu'à 86 milliards d'euros pour les trois prochaines années. Les caisses de l'Etat sont vides et le pays n'a plus de quoi rembourser les sommes déjà prêtées depuis 2010. Athènes doit verser 3,4 milliards d'euros à la Banque centrale européenne jeudi prochain.
Son économie, asphyxiée par l'incertitude sur le sort du pays et un contrôle des capitaux en vigueur depuis fin juin, attendait aussi ce bol d'air indispensable.
L'accord "est essentiel pour lever les incertitudes qui ont pesé sur la Grèce pendant six mois et pour retrouver la confiance", a commenté le vice-président de la Commission chargé de l'euro, Valdis Dombrovskis.
Avant que cette aide soit déboursée, plusieurs Parlements nationaux, dont le Bundestag allemand mercredi, doivent approuver l'accord.
La première tranche d'aide s'élèvera à 26 milliards d'euros, dont un versement "immédiat" de dix milliards placés pour recapitalisation des banques grecques, a décidé l'Eurogroupe vendredi.
La deuxième "sous-tranche", de 16 milliards d'euros, commencera par un versement de 13 milliards d'euros d'ici au 20 août, suivi d'un ou plusieurs autres à l'automne, en fonction de la mise en oeuvre des réformes.
- Calendrier électoral casse-tête -
C'est sur cette mise en oeuvre du programme que toute l'attention et toutes les craintes des créanciers (UE, Banque centrale européenne, Mécanisme européen de stabilité et Fonds monétaire international) vont désormais se porter.
Le rythme à tenir est frénétique: le quotidien libéral Kathimerini décomptait samedi près de 40 mesures dans le domaine fiscal, du droit du travail, de la concurrence, de la sécurité sociale et des retraites à voter et faire entrer en vigueur d'ici la fin de l'année.
"Les cinq années des deux mémorandums précédents (2010 et 2012, ndlr) ont beaucoup appris à tout le monde. Les créanciers ont appris que s'ils ne conditionnent pas les versements d'argent à des mesures, les gouvernements grecs ne les appliquent pas ()" remarquait samedi l'éditorialiste de Kathimerini Nikos Kontantaras.
La volonté politique du gouvernement d'Alexis Tsipras va être mise à l'épreuve mais aussi sa capacité à disposer d'une majorité solide pour conduire ces changements.
Le vote vendredi par le Parlement grec du plan d'aide et des 400 pages de mesures qui l'accompagnent a approfondi les fractures au sein du Syriza, le parti de gauche radicale d'Alexis Tsipras, passé sous la barre psychologique des 120 voix (sur 149 députés Syriza et 13 députés de son partenaire de coalition de droite souverainiste ANEL) en faveur de l'accord.
Même si, selon la presse, Alexis Tsipras a déjà fait part à ses partenaires européens du caractère inévitable de législatives anticipées à l'automne, trouver une date pour les organiser relève du casse-tête.
Un scrutin fin septembre couperait l'herbe sous le pied à la dissidence eurosceptique qui se profile au sein de Syriza, encore peu organisée, mais pourrait retarder la mise en oeuvre de l'accord. Fin octobre, le gouvernement pourrait compter sur une première évaluation positive des créanciers voire un engagement sur la restructuration de la dette, mais Alexis Tsipras court aussi le risque de voir sa popularité se dégrader.
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