La saison des pluies se fait attendre et les terrasses font encore le plein à Kebele 16, quartier de Mekele, une ville du nord de l'Ethiopie, où s?égrènent de nombreux cafés et restaurants, sans qu'une seule volute de fumée ne soit visible.
Mekele applique avec rigueur une interdiction de fumer dans tous les lieux publics. La capitale de la région du Tigré n'est pas la première ville d'Afrique de l'Est à imposer une interdiction de fumer dans ses lieux publics. Nairobi fait également la chasse aux fumeurs dans la rue, mais la mesure est allègrement contournée à l'exception notable du quartier des affaires.
"C?est une bonne chose", commente Hiriti, la propriétaire d?un petit bar dans une rue très fréquentée où les établissements se succèdent les uns aux autres, satisfaite de ne plus avoir à travailler dans une atmosphère enfumée.
"Bien sûr, certains clients ne sont pas contents. Je leur dis que ce n?est pas seulement une question de respect de la loi. C?est aussi pour protéger leur santé. Ca passe mieux", ajoute la jeune femme.
Une loi bannissant le tabac des lieux publics a été votée en 2014 par le parlement éthiopien, mais Mekele est la première ville à l?appliquer.
L?interdiction en vigueur depuis le mois de janvier s?impose aux cafés, restaurants, écoles, hôpitaux, ainsi qu'aux événements culturels, sportifs et religieux, à l?intérieur comme à l?extérieur des établissements.
Les contrevenants, clients et propriétaires, s?exposent à une amende dissuasive de 1.000 Biir éthiopiens (50 dollars américains). Une petite fortune en Ethiopie où les salaires dépassent rarement les 100 dollars par mois.
"On ne voit quasiment plus de fumeurs. Les gens ont vraiment arrêté", se réjouit Teklay Weldemariam, le chef du département santé de la ville, l'un des artisans de la mise en oeuvre de cette loi. "Les maladies non transmissibles, comme le cancer, sont en augmentation. Il est grand temps de bannir la cigarette", dit-il.
La petite ville de Mekele fait figure de pionnière sur le continent africain où la consommation de tabac ne cesse d?augmenter, poussée par des cigarettiers qui voient l'Afrique comme un marché en pleine expansion, alors que les législations se durcissent sans cesse dans les pays du Nord.
La consommation de tabac en Afrique (à l?exclusion de l?Afrique du Sud) a augmenté de près de 70% entre 1990 et 2010, selon une étude de l?American Cancer Society. Le nombre de fumeurs africains devraient encore croître de 40% d?ici 2030.
- Après le tabac, le khat? -
"Je sais que d?autres villes éthiopiennes s?intéressent à l?expérience de Mekele. Cela peut aussi inspirer d?autres villes d?Afrique de l?Est", ajoute Teklay Weldemariam, convaincu que l?exemple de Mekele va faire tache d?huile.
Difficile en tous cas de trouver une voix dissonante à Mekele, la contestation des lois publiques n'étant de tout façon pas très répandue dans la très autoritaire Ethiopie. Les rares contrevenants à l?interdiction de fumer fuient les questions. "Je préfère ne rien dire. Je vais bientôt arrêter", assure un jeune homme, cigarette aux lèvres, assis à la terrasse d?un café.
D?autres savourent au contraire leur revanche. "Si vous entriez dans un café avec de la fumée, vous ne pouviez rien dire parce que cela faisait partie de la vie sociale. C'était complètement accepté. Cette interdiction est une très bonne idée", se réjouit John Hailé Selassié.
Après la chasse au tabac, les autorités ont également en ligne de mire le khat, une plante narcotique aux vertus légèrement euphorisantes, très prisée dans la Corne de l'Afrique.
"La consommation est en hausse et le gouvernement veut faire quelque chose", assure Teklay Weldemariam, tout en reconnaissant que le sujet est "sensible" tant le fait de mastiquer les feuilles de khat fait "partie des coutumes et des traditions" dans certaines régions d?Ethiopie.
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