Le Parlement grec vote jeudi sur le nouvel accord de prêt avec les créanciers du pays, le troisième depuis 2010, qui expose le Premier ministre Alexis Tsipras à la défiance tant de l'Allemagne, réservée sur le texte, que de son propre parti politique, profondément divisé.
En prévision d'un Eurogroupe décisif vendredi -réunion des ministres des Finances de la zone euro-, Alexis Tsipras doit convaincre que le projet de loi de 400 pages rédigé durant deux semaines sous la houlette des représentants des créanciers du pays remplit toutes les conditions pour que la Grèce puisse toucher rapidement un premier versement sur les quelque 85 milliards d'aide prévus.
Athènes compte sur une première tranche de 20 à 25 milliards d'euros pour rembourser 3,4 milliards à la Banque centrale européenne (BCE) jeudi prochain et injecter immédiatement 10 milliards d'euros aux banques du pays, mises à mal par les massifs retraits d'épargne de Grecs inquiets, et le contrôle du crédit instauré fin juin, qui ralentit l'économie, même s'il les protège d'une panique accrue des épargnants.
Beaucoup d'analystes sont sceptiques sur la capacité du nouveau programme à relancer l'économie du pays.
Alors que les prévisions européennes tablent un recul de 2,3% du PIB pour 2015, la Grèce a fait cependant mieux qu'attendu au 2ème trimestre avec un PIB en hausse de 0,8% par rapport au premier, alors que les économistes attendaient un net recul. Par ailleurs, le pays n'est finalement pas retombé en récession en début d'année, selon l'agence des statistiques grecques (ELSTAT).
Mais le contrôle des capitaux pèsera à coup sévèrement sur les performances du deuxième semestre.
L'Allemagne reste plus que circonspecte sur le nouveau programme, et a d'ores et déjà annoncé qu'elle soulèverait "des questions", lors de l'Eurogroupe.
Selon le quotidien Bild, qui cite notamment un document de deux pages du ministère allemand des Finances, les réserves de Berlin concernent la participation incertaine du FMI au programme, la soutenabilité de la dette et les privatisations.
Peut-être Berlin voudra-t-elle insister vendredi en faveur d'un prêt-relais à Athènes, donnant le temps d'obtenir des réponses à ses questions, tout en permettant à la Grèce de payer à temps la BCE.
Le secrétaire d'Etat aux Finances Jens Spahn a assuré jeudi qu'il y avait "une proposition commune" de la France et de l'Allemagne sur les détails à fournir, ce que n'a pas confirmé Paris.
La Commission européenne a indiqué cependant avoir anticipé le scenario d'un prêt-relais en préparant les documents nécessaires à cette éventualité.
- Vote en Allemagne mardi ou mercredi -
Pour sa part, le président du Bundestag, Norbert Lammert, ne semble pas s'attendre à un blocage complet par son pays puisqu'il a indiqué aux députés allemands que si la Vouli, le Parlement grec, donnait son feu vert jeudi, il les convoquerait pour une session extraordinaire mardi ou mercredi afin de voter à leur tour.
A la Vouli, les travaux en commission ont commencé en matinée et se poursuivaient toujours à 15h00 GMT, augurant d'une séance plénière tardive et d'un vote aux petites heures de l'aube, formule récurrente depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement d'Alexis Tsipras en janvier.
Il y a peu de suspense sur l'adoption du texte, une feuille de route jusqu'à 2018 mêlant mesures budgétaires et réformes structurelles.
Trois grands partis d'opposition (Nouvelle Démocratie, conservateur, Pasok, socialiste, et Potami, centre-gauche) devraient en effet apporter leurs 106 voix (sur 300).
Mais M. Tsipras va de nouveau être confronté à la fracture que crée ce nouveau programme d'austérité dans son propre parti, avec, comme lors des votes du mois de juillet sur de premiers volets de mesures, de nombreuses défections à prévoir parmi les 149 députés Syriza.
La perspective d'une scission de ce parti, arrivé au pouvoir pour la première fois en janvier, n'est plus un tabou et les frondeurs semblent avoir débuté une campagne en vue de constituer leur propre formation pour des législatives anticipées qui pourraient avoir lieu à l'automne.
Le chef de file des eurosceptiques, l'ancien ministre de l'Energie, Panagiotis Lafazanis a fait un pas de plus dans cette direction jeudi matin en appelant, dans une déclaration écrite signée par d'autres membres de Syriza, à la "constitution d'un large mouvement panhellénique () de lutte contre le nouveau memorandum, l'austérité et la mise sous tutelle du pays".
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