L'apparition en Corse de la bactérie tueuse de végétaux Xylella fastidiosa inquiète de nombreux agriculteurs du Sud de la France qui craignent que les touristes qui circulent entre l'île et le continent mettent en péril leur patrimoine végétal méditerranéen d'oliviers ou de lauriers roses.
Les 30.000 hectares d'oliviers, soit un million d'arbres, infectés par la bactérie dans les Pouilles (Sud de l'Italie) paraissaient être une menace distante. Avec les 17 cas de Xylella fastidiosa détectés dans le sud de la Corse (uniquement sur des plantes ornementales), la menace semble désormais aux portes de la région Provence Alpes Côte d'Azur (Paca).
"L'alerte en Corse est arrivée au plus mauvais moment, dans la période estivale où nombre de vacanciers font l'aller-retour entre la Corse et le continent. Chaque famille a envie de ramener un souvenir, qui une branche de lauriers roses, qui une branche de lentisque", prévient l'oléiculteur Jean-Philippe Frère, dans la région de Grasse (Alpes-Maritimes).
"Il suffit de couper une petite branche infectée en Corse et puis quand on revient par Nice, Marseille, Toulon ou Gènes, on ouvre les fenêtres et le prédateur s'échappe du véhicule pour se poser sur les végétaux et les infecter", s'inquiète-t-il.
La Xylella fastidiosa s'attaque à 209 variétés de végétaux dont potentiellement la vigne, le chêne, l'érable, les arbres à agrumes, et même une variété de mimosa. Elle est transmise par des insectes piqueurs suceurs, comme la cicadelle, qui attaquent le faîte des arbres qui se dessèchent rapidement avant de contaminer les végétaux voisins.
- après les ravages de la mouche de l'olive -
Cent quarante-deux contrôles, tous négatifs, ont été effectués en région PACA dans le cadre de la lutte contre la bactérie tueuse, a annoncé lundi le nouveau préfet de région, Stéphane Bouillon.
"Ca n'a pas touché la vigne, donc le gouvernement ne s'est pas senti concerné", critique néanmoins Claude Martin, oléicultrice bio dans les Alpes-Maritimes, où l'on cultive exclusivement la variété "cailletier" (qui produit l'AOP olive de Nice). "Le gouvernement aurait dû mettre en place un blocus des végétaux arrivant d'Italie".
"Ca va être difficile de passer à travers ça", s'inquiète-t-elle, pessimiste. "Si les restanques provençales n'ont plus d'arbres, ce sera une catastrophe et la fin de notre patrimoine".
L'inquiétude des oléiculteurs et des moulins à olives est d'autant plus vive que les professionnels du Sud de la France ont connu une récolte 2014 catastrophique en raison des ravages de la mouche de l'olive.
Si les grosses chaleurs ont tenu la mouche à distance, la récolte se fera seulement vers le mois d'octobre. "En une heure, à l'aube, vous pouvez perdre toute votre récolte", précise Sylvain Arbaud, un confrère oléiculteur qui précise qu'il ne pourra pas tenir en cas de récolte anémique deux années d'affilée.
Les Alpes-Maritimes sont le premier département de la région Paca à avoir édité cette semaine une brochure de prévention. A l'occasion des tailles de végétaux, il est par exemple recommandé de désinfecter systématiquement ses outils à la javel ou l'alcool. Mais en cas de suspicion, il faut immédiatement isoler l'arbre et ne pas déplacer d'échantillons.
"C'est une maladie qu'on connaît depuis 130 ans et qui tourne dans le monde entier", précise le président de l'Afidol (Association française interprofessionnelle de l'olive), Olivier Nasles, qui tente pour sa part de calmer les esprits. "Il est bien trop tôt pour crier au loup!", dit-il.
Une seule sous-espèce de la bactérie Xylella fastidiosa, très différente de celle qui sévit en Italie, est actuellement présente en Corse.
La souche corse de la bactérie ne s'attaque absolument pas aux oliviers, selon les chercheurs de l'Institut national de la recherche agronomique (Inra) consultés. En outre, le végétal infecté a été planté à Propriano en Corse en 2010 et venait d'une pépinière de Toscane. Il ne s'agit donc aucunement d'une importation récente des Pouilles, insiste-t-il.
Oléiculteur et viticulteur à Aix-en-Provence, Olivier Nasles note enfin que la souche italienne de la bactérie ne s'attaque pas aux vignes. A moins de muter, ce qui représenterait alors un risque majeur pour l'économie française.
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