Google a annoncé jeudi qu'il refusait de se mettre totalement en conformité avec la question du "droit à l'oubli" imposé par la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil), arguant que l'instance française n'était pas compétente "pour contrôler" les informations accessibles à travers le monde.
En clair, Google accepte de concéder le droit à l'oubli pour des recherches faites sur Google.fr ou Google.uk mais pas sur celles faites via Google.com ou toute autre extension non-européenne.
"Nous respectons la position de la Cnil mais nous contestons par principe l'idée qu'une agence nationale de protection des données personnelles revendique une autorité à l'échelle mondiale pour contrôler les informations auxquelles ont accès les internautes à travers le monde", a indiqué Google dans un billet publié sur le blog européen du moteur de recherche.
"Nous pensons qu'aucun pays ne devrait avoir l'autorité de décider à quel contenu peut accéder quelqu'un, dans un autre pays", a estimé Google à travers son responsable des questions privées, Peter Fleischer, qui entend rappeler que "97% des internautes français accèdent à Google par une version européenne".
Contacté par l'AFP, la Cnil a indiqué "avoir bien reçu un recours gracieux de la part de Google aujourd'hui (jeudi)", un jour avant l'expiration "du délai d'un mois" qu'avait demandé le moteur de recherche pour se mettre en conformité avec la loi.
"Nous allons regarder les arguments et nous répondrons à ce recours dans le délai légal de deux mois", a indiqué la Cnil, qui se réserve "la possibilité d'une phase répressive".
En cas de sanction, Google devra verser une amende pouvant aller jusqu'à 150.000 euros.
- Bonne foi -
Pour montrer sa bonne foi, Google a mis en ligne "un rapport de transparence" dans lequel il recense les demandes de déréférencement "reçues et traitées".
"Au niveau mondial, nous avons reçu 290.353 demandes portant sur 1.055.700 URLs", indique Google dans un communiqué, tandis qu'il dénombre 60.241 demandes portant sur 203.889 URLs au niveau français.
"Nous avons beaucoup travaillé pour mettre en ?uvre l'arrêt sur le droit à l'oubli avec rigueur et exhaustivité en Europe, et nous continuerons à le faire", a ajouté le groupe de Mountain View.
En mai 2014, la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) avait consacré ce droit à l'oubli numérique (ou droit au déréférencement), c'est-à-dire le droit de faire supprimer des moteurs de recherche les liens vers des pages comportant des informations personnelles, notamment si elles sont périmées ou inexactes.
Concrètement, "toute personne qui souhaite voir effacer un ou plusieurs résultats apparaissant sous une requête à partir de son nom peut en faire la demande au moteur de recherche", selon l'autorité de contrôle de protection des données.
Google, bien que contestant la décision, avait accepté le jugement et mis en place un formulaire pour tout internaute désirant qu'une information à son sujet n'apparaisse plus dans le moteur de recherche lorsque son nom est saisi.
Mais la Cnil, saisie de plusieurs centaines de demandes de particuliers s'étant vu refuser le déréférencement de liens Internet (ou adresses URL) par Google, a adressé au mois de juin une mise en demeure du géant américain.
Si le moteur de recherche avait certes donné suite aux demandes des internautes, il l'avait fait seulement sur les extensions européennes (telles google.fr, google.uk, google.de) et non sur google.com, selon l'instance française.
La Cnil avait rappelé que "cette mise en demeure n'(était) pas une sanction", mais que si Google ne s'y conformait pas, la Commission pourrait décider de "sanctionner les manquements à la loi Informatique et libertés" de l'entreprise.
En décembre 2014, Google avait été condamné pour la première fois par une juridiction française pour avoir refusé une demande de droit à l'oubli numérique.
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