Une crise après l'autre: après la viande les professionnels du lait, producteurs, industriels et distributeurs, sont réunis vendredi autour du ministre de l'Agriculture pour convenir d'une revalorisation des cours.
Après quelques mois d'embellie en 2014, les prix du lait sont repartis à la baisse, déprimés par un contexte mondial défavorable: quatre mois après la sortie des quotas européens, en vigueur depuis plus de trente ans, la tonne de lait ne dépasse pas 300 euros contre 365 en 2014.
"Il est évident que les producteurs ne peuvent continuer en l'état actuel des choses" a prévenu le président de leur fédération, la FNPL, Thierry Roquefeuil à l'issue d'une réunion préparatoire jeudi soir avec le ministre Stéphane Le Foll.
Pour faire pression sur les transformateurs, les éleveurs bloquent vendredi matin plusieurs laiteries de Vendée et dans la Manche et empêchent la sortie des produits finis.
Ils comptent se relayer ainsi jusqu'à mardi selon Sébastien Armand, président de la FDSEA de la Manche. En Vendée, tout dépendra de l'issue de la réunion prévient son homologue Joël Limouzin.
Ailleurs en revanche, aussi bien dans l'ouest qu'autour de Lyon, les derniers barrages routiers ont été levés et les éleveurs conduisent plutôt des actions ciblées contre les enseignes ou les établissements qu'ils accusent de les tromper.
"Un gros travail" sera nécessaire, a reconnu M. Le Foll qui attend l'engagement de tous: "au-delà des distributeurs, il faudra que la hausse des prix puisse se répercuter sur tous" a-t-il dit, même si en la matière "rien n'est tout à fait simple en raison d'un grand mixte de produits" dérivés du lait - poudre, beurre etc.
Le ministre veut surtout, par cette réunion au grand complet, "envoyer un message à l'ensemble des producteurs laitiers" qui se sont particulièrement mobilisés en début de semaine en Normandie, leur principal bassin de production.
- Un appel à l'Europe -
M. Roquefeuil a confié à l'AFP avoir insisté pour que la réunion se tienne avant le week-end, au terme d'une séquence particulièrement agitée qui a vu de nombreux axes vers les grandes villes bloqués par les tracteurs.
Simultanément, M. Le Foll s'est tourné vers l'Europe: après avoir appelé plusieurs de ses homologues dont les pays traversent une crise similaire (Italie, Belgique, Allemagne, Irlande et Luxembourg, Etat qui préside le Conseil européen), il a obtenu jeudi la convocation d'un conseil européen des ministres de l'Agriculture pour le début du mois de septembre.
La France, a-t-il rappelé, avait réclamé une revalorisation du prix d'intervention du lait (mécanisme de soutien européen, activé en cas d'effondrement des cours): "On a évité le pire mais la revalorisation n'a pas eu lieu".
Or outre la fin des quotas, l'embargo russe sur les produits agroalimentaires a contribué à engorger le marché européen, alors que la demande chinoise, en pleine croissance depuis 2010, s'est brusquement réduite de moitié en poudre de lait.
Mais les éleveurs français refusent de se sentir les seuls otages du marché mondial: "On ne peut pas dire aux producteurs qu'ils doivent évoluer dans un contexte mondialisé et garder des charges sociales ou fiscales typiquement françaises. En ce cas, on veut aussi des charges mondialisées" se défend M. Roquefeuil qui espère une mise à plat de "l'ensemble des charges pesant sur les exploitations".
Pour lui, "Il faut un effort de la part des distributeurs comme des transformateurs et, dans une moindre mesure, du consommateur".
"On avait de telles difficultés de trésorerie que si 2014 a permis de combler une partie du déficit du passé, après six mois, on est déjà retombé, surtout les plus jeunes et qui nous préviennent qu'ils ne tiendront pas 20 ans à ce rythme", affirme le patron de la FNPL.
Le 17 juin, la filière bovine au grand complet avait été réunie en table ronde sous l'égide du ministre et s'était accordée sur une augmentation des prix payés aux producteurs. Qui n'a été que partiellement respectée selon le rapport du médiateur remis mardi soir au ministre.
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