Trois personnes ont été arrêtées jeudi après le meurtre de deux policiers revendiqué par les rebelles du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) en représailles à l'attentat antikurde meurtrier attribué au groupe jihadiste Etat islamique (EI).
Sur fond de tensions politiques croissantes dans tout le pays, les forces de l'ordre ont interpellé trois suspects soupçonnés d'avoir participé à l'assassinat des deux agents retrouvés morts la veille, exécutés d'une balle dans la tête à leur domicile de Ceylanpinar (sud-est), à la frontière syrienne.
Le gouvernement turc, qui a promis de sévir contre le groupe EI, a rendu hommage jeudi à ses deux "martyrs". "Le sang versé par nos martyrs ne restera pas impuni", a lancé lors d'une cérémonie le chef de la police locale, Eyüp Pinarbasi.
L'opération du PKK, présentée comme une "action punitive" après l'attaque qui a frappé Suruç (sud) lundi, a ravivé les risques de débordement en Turquie de la guerre qui oppose les milices Kurdes aux jihadistes sur le sol syrien.
Une organisation proche des rebelles kurdes de Turquie a ainsi affirmé sur son site internet avoir tué mardi soir à Istanbul un commerçant présenté comme un membre du groupe EI. "Les meurtriers de Suruç rendront des comptes", a écrit le Mouvement de la jeunesse patriotique révolutionnaire (YDG-H).
Cet attentat, qui a fait 32 morts et une centaine de blessés, a visé un groupe de jeunes militants de gauche partisans de la cause kurde qui souhaitaient participer à la reconstruction à Kobané. Cette ville syrienne a été détruite par quatre mois d'intenses combats qui se sont soldés par la victoire des Kurdes sur l'EI.
Depuis l'attaque, le gouvernement islamo-conservateur turc est la cible de nombreuses critiques. Ses détracteurs l'accusent de ne pas avoir pris la juste mesure de la menace jihadiste. D'autres d'avoir fermé les yeux sur les activités de l'EI sur son sol, principal point de passage de ses recrues vers la Syrie.
Un éditorialiste éminent du quotidien Milliyet, Kadri Gürsel, a été licencié mercredi pour avoir mis en cause la responsabilité du président Recep Tayyip Erdogan dans l'attentat.
Ankara a toujours catégoriquement réfuté ces allégations.
Le pouvoir utilisera "tous les moyens pour traquer les auteurs" de l'attentat, a répété mercredi M. Erdogan. "Il est honteux que certaines communautés n'aient pas le courage de condamner les attaques du PKK", a-t-il ajouté à l'intention des dirigeants kurdes.
- Sécurité renforcée -
De nombreux manifestants, notamment kurdes, défilent chaque jours dans les villes du pays pour dénoncer la politique syrienne de M. Erdogan. Ces rassemblements ont été systématiquement réprimés par la police.
Selahattin Demirtas, le chef du principal parti kurde du pays, le Parti démocratique des peuples (HDP) qui a obtenu près de 13% des voix aux législatives du 7 juin, a appelé à un grand rassemblement antijihadiste dimanche après-midi à Istanbul.
Mis en cause par l'opposition et dans la rue, le Premier ministre Ahmet Davutoglu s'est efforcé de faire taire ses rivaux en promettant de renforcer sa lutte contre les jihadistes.
"Nous considérons Daech (l'acronyme arabe de l'EI) comme une menace () notre système de contrôle à la frontière (syrienne) va être renforcé", a promis mercredi soir le porte-parole du gouvernement Bülent Arinç à l'issue d'un conseil des ministres extraordinaire.
Une nouvelle réunion des chefs de l'armée et des services de sécurité et de renseignement était prévue jeudi après-midi autour de M. Davutoglu.
Selon le quotidien Hürriyet citant des responsables turcs, le gouvernement envisage de déployer des dirigeables au-dessus des 900 km de sa frontière syrienne et de doubler sa ligne de barrières afin d'empêcher les mouvements des jihadistes.
Lors d'une conversation téléphonique mercredi soir, M. Erdogan et son homologue américain Barack Obama sont convenus "d'intensifier" leur coopération contre les jihadistes. La presse turque évoque l'ouverture de la base aérienne d'Incirlik (sud) aux avions de la coalition internationale qui intervient en Syrie et en Irak.
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