Trois jeunes hommes, dont un ancien militaire, soupçonnés d'avoir projeté l'attaque d'un fort des Pyrénées-Orientales et la décapitation d'un officier au nom du jihad, étaient en garde à vue jeudi à la DGSI.
Agés de 17, 19 et 23 ans, les trois hommes entendus par la Direction générale de la Sécurité intérieure (DGSI) ont été interpellés lundi, veille de Fête nationale, à 06H00, comme un adolescent de 16 ans depuis relâché.
L'opération n'avait pas fuité jusqu'à ce que François Hollande lâche mercredi que "des actes terroristes" avaient été déjoués "cette semaine". Le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve a peu après évoqué une "action terroriste contre des installations militaires françaises". Face à ces annonces en pleine garde à vue, le directeur général des Républicains (ex-UMP) Frédéric Péchenard a dénoncé une "volonté d'appropriation politique" de l'antiterrorisme.
Les militaires sont une cible récurrente des jihadistes en France: Mohamed Merah en avait assassiné trois et très grièvement blessé un en mars 2012. Des membres de la cellule dite de Cannes-Torcy, démantelée quelques mois plus tard, projetaient d'attaquer des soldats. En mai 2013, un militaire participant à l'opération Vigipirate avait été blessé dans la station de RER de La Défense, et trois militaires en faction devant un centre juif de Nice ont été agressés au couteau début 2015, un mois après les attentats de Paris.
Selon une source proche du dossier, les trois hommes, qui se réclament en garde à vue de l'organisation de l'Etat islamique (EI) et revendiquent leur engagement jihadiste, auraient eux projeté d'attaquer le Fort Béar, un camp militaire situé sur les hauteurs de Port-Vendres.
Ils auraient envisagé d'y tuer des militaires en poste dans ce sémaphore, et de décapiter le chef du détachement, a expliqué la source. Une scène que, selon une source proche de l'enquête, ils auraient souhaité filmer pour la diffuser sur internet. Fort Béar abrite le centre national d'entraînement commando, tout près de Collioure.
- Repérés par les services -
Ce projet aurait été envisagé pour la fin d'année, peut-être le 31 décembre 2015, en tablant sur le fait que les effectifs y auraient été plus réduits en cette période de fêtes, a rapporté la source.
Le plus âgé du trio a "pu être posté à Fort Béar" avant d'être réformé de la Marine nationale, selon cette source. Son contrat avec l'armée s'est achevé le 21 janvier 2014. Il avait des problèmes de santé, selon la source proche du dossier qui a ajouté qu'il avait pu "nourrir une rancune personnelle contre le chef de détachement".
Arrêtés dans le Nord, les Yvelines et à Marseille, selon la source, les trois hommes sont entrés en contact par internet, via des applications cryptées. Un billet de train retrouvé chez l'un d'eux accrédite l'hypothèse selon laquelle ils comptaient se rencontrer rapidement.
Ils auraient initialement envisagé de se rendre en Syrie pour y mener le jihad. Mais la radicalisation du plus jeune a été signalée par un membre proche de sa famille. Décrit comme "un élément moteur", le jeune homme de 17 ans a été repéré et a fait l'objet d'un entretien administratif.
Selon Bernard Cazeneuve, son "activisme sur les réseaux sociaux", avait également été identifié.
Se sachant surveillés, les trois hommes auraient dès lors renoncé à se rendre en Syrie, explique la source. Un jihadiste avec qui ils étaient en contact dans ce pays leur aurait alors conseillé de passer à l'action en France.
Aucune arme ni explosifs n'ont été retrouvés durant les perquisitions. Mais, selon une source proche du dossier, ils auraient exprimé le souhait de se procurer des armes de poing. Des documents sur des explosifs ont été découverts chez l'un d'eux, selon la source proche du dossier.
Le parquet de Paris avait ouvert le 23 juin une enquête préliminaire "pour association de malfaiteurs en vue de préparer des actes de terrorisme".
Depuis le début de l'année, les actions au nom du jihad se sont multipliées en France: attentats de Paris qui ont fait 17 morts en plus des auteurs en janvier, projet d'attaque évitée contre des églises du Val-de-Marne dont l'auteur présumé est soupçonné d'avoir tué une jeune femme, décapitation d'un chef d'entreprise par un de ses employés en Isère.
"Nous faisons face à une menace terroriste que nous n'avons jamais connue, inédite. Une menace extérieure et une menace intérieure", a affirmé jeudi matin Manuel Valls.
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