Sous un soleil de plomb et dans une atmosphère où flotte une odeur de friture, des milliers de Montréalais et de touristes succombent en plein été aux plaisirs de la poutine, spécialité québécoise hautement calorique, grâce à ses variantes déclinées par quelques chefs en vogue.
Des frites parsemées de dés de fromages de type cheddar, le tout recouvert d'une sauce brune épaisse, et la poutine est prête pour la dégustation.
Sur les quais du Vieux-Port de Montréal, par une chaude journée d'été, les amateurs de ce plat se pressent pour goûter aux compositions de quelques grands chefs à l'occasion du "Poutinefest", première édition à Montréal d'un festival généralement au calendrier des comités des fêtes des autres villes du Québec.
De longues files d'attente serpentent au milieu d'une petite vingtaine de "food trucks", tous spécialisés dans la poutine. Le mercure flirte avec les 30 degrés, mais "il ne fait jamais trop chaud pour manger de la poutine!", s'exclame Camille, jeune montréalaise venue "découvrir de nouvelles recettes de poutines".
L'originalité de ce festival culinaire consiste à agrémenter la recette traditionnelle. Au total, une trentaine de variantes sont proposées.
Entre la poutine recouverte de foie gras et de canard confit, celle au homard - dont la saison de pêche bat son plein -, au bacon ou au double cheeseburger, les amateurs ont aussi le choix pour la poutine aux côtes levées sauce barbecue, au porc mariné ou flambée au Jägermeister, célèbre digestif allemand.
L'engouement pour cette spécialité de la province francophone s'explique d'abord par la simplicité de sa préparation, permettant les nombreuses variations, mais surtout par son lien étroit avec la culture locale. "La poutine est au Québec ce que le foie gras ou le vin est à la France", explique Alexandre Lvowitsch, directeur de l'événement.
Les fèves au lard, les oreilles de crisse (lard salé et frit) ou le pâté chinois (parmentier et maïs) sont quelques unes de spécialités de la gastronomie québécoise, mais la plus populaire reste la poutine. "Nous sommes fiers de faire honneur à notre belle patrie", s'enthousiasme Gérôme Paquette, chef du restaurant "L'Gros Luxe", un établissement tendance du quartier "hipster" du Mile End.
- Entre tradition et modernité -
Pendant la "Poutinefest", un peu plus de 100.000 personnes dévorent 35 tonnes de pommes de terre, 10 tonnes de fromages et quelques hectolitres de sauce.
Inutile d'espérer faire régime, s'amuse Gérome Paquette qui préfère "arrêter de compter les calories", une ration dépassant le millier de calories, selon les accompagnements..
Le plat est aux antipodes de la tendance moderne prônant une alimentation saine et peu calorique. Le chef Paquette adapte sa recette avec une "sauce végétarienne sans gluten".
La poutine était encore récemment confinée aux friteries et autres poutineries ouvertes 24 heures sur 24. Répertoriée dans tous les guides touristiques, "La Banquise" propose uniquement une carte d'une trentaine de poutines et il n'est pas rare d'y faire la queue à 3h00 du matin à la sortie des discothèques ou bars de nuit, même par des températures polaires.
Dorénavant, elle se retrouve à la table des restaurants les plus réputés comme "Au Pied de Cochon" de Martin Picard, où l'on sert une poutine au foie gras, ou au "Bouillon Bilk", restaurant au style épuré au coeur du choc entre tradition et modernité culinaire.
Pour la copropriétaire de cet établissement, Mélanie Blanchette, la gastronomie québécoise s'éloigne peu à peu de ses racines pour proposer des plats plus élaborés.
Plat populaire s'il en est, la poutine fait de la résistance. "Le menu a souvent changé, mais la poutine est le seul plat présent à la carte depuis l'ouverture il y a 4 ans" et l'unique tentative pour la retirer "a provoqué un tonnerre de protestations, alors nous l'avons remise", confie à l'AFP la jeune restauratrice.
Si elle reste un classique de la table québécoise, les chefs se démarquent difficilement de l'image de "malbouffe" qu'elle véhicule.
"A l'heure actuelle, il nous faut redéfinir la cuisine et divorcer de cette poutine", avance Mélanie Blanchette. Pas question pour autant de renier "un plat si simple à faire" et, sans risque d'égratigner l'image du restaurant, la cheffe préfère "offrir cette signature locale avec des produits de qualité".
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