Une cinquantaine d'avocats chinois défenseurs des droits de l'Homme ont été arrêtés ou inquiétés ces derniers jours par la police, et une vingtaine restaient probablement en détention, rapportaient samedi des activistes et des ONG, dénonçant une campagne de répression "sans précédent".
C'est la firme juridique pékinoise Fengrui qui a d'abord attiré l'attention, à mesure que plusieurs de ses avocats, spécialistes reconnus des droits civils, se voyaient interpellés ou disparaissaient.
Wang Yu, une juriste chevronnée, s'est ainsi évanouie aux aurores jeudi, après avoir averti des amis que des individus cherchaient à s'introduire chez elle. "Depuis, nous n'avons aucune information à son sujet", souligne William Nee, chercheur à Hong Kong pour Amnesty International.
Le lendemain, l'un de ses collègues, Zhou Shifeng, était arrêté dans un hôtel de Pékin: trois membres des forces de sécurité publique lui ont couvert la tête avant de l'emmener, ont raconté à l'AFP des témoins de la scène.
Et ce alors même qu'une assistante chinoise du magazine allemand Die Zeit, emprisonnée au retour de manifestations prodémocratiques à Hong Kong et que Me Zhou avait défendue l'automne dernier, venait d'être libérée.
"Au moins cinq personnes travaillant pour Fengrui ont été arrêtées () sous prétexte d'+enquête+, sans chef d'accusation", et leurs bureaux ont été longuement perquisitionnés, a expliqué à l'AFP l'avocat Zhang Qingfang, un de leurs proches.
Mais au-delà, "la répression s'est considérablement élargie", frappant nombre de personnalités emblématiques de la défense des droits de l'Homme en Chine, relève M. Nee.
- Filatures et perquisitions -
D'après Amnesty, quelque 50 avocats et activistes ont été visés par cette vaste campagne d'intimidation à l'échelle du pays.
"Dans de nombreuses villes, il y a eu des personnes arrêtées, convoquées pour interrogatoire, qui ont +disparu+ ou vu leur liberté de mouvement entravée", énumère William Nee.
Samedi soir, seule la moitié d'entre eux avaient regagné leur domicile, les autres restant en détention selon toute probabilité, relatait Amnesty, qui évoquait une répression d'une ampleur "sans précédent".
L'ONG chinoise Weiquanwang ("Rights Defense Network") avait dénombré plus tôt samedi 57 personnes inquiétées par les forces de l'ordre en 48 heures.
Un avocat pékinois, Zhang Kai, a envoyé samedi un ultime message téléphonique: "La police arrive". Depuis, ses proches sont sans nouvelle.
Grande figure des milieux militants, Li Heping a lui été emmené vendredi par la police, après --rapportait le New York Times-- une perquisition de son domicile et la saisie de ses ordinateurs.
Il s'était illustré dans des affaires d'expropriations abusives et avait plaidé la cause de dissidents, dont Chen Guangcheng, militant aveugle enfui par la suite aux Etats-Unis.
Liu Xiaoyuan, défenseur de l'artiste Ai Weiwei et de l'intellectuel ouïghour Ilham Tohti (condamné à la prison à vie pour des idées supposément "séparatistes"), est aussi du nombre.
Selon Amnesty, il a été victime d'une filature, avant que sa famille ne perde le contact.
Sui Muqing, avocat du Guangdong (sud), a été interpellé vendredi soir et formellement accusé de "fomenter des troubles et d'attiser des querelles" --motif utilisé couramment pour museler les critiques du régime.
- 'Attaque coordonnée' -
Sui avait défendu plusieurs militants --dont le poète Wang Zang-- arrêtés en octobre pour avoir soutenu les manifestants prodémocratiques de Hong Kong.
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