Au lendemain de la polémique sur les Guignols, le patron de Vivendi, Vincent Bolloré, a promis de maintenir les marionnettes à l'antenne, mais a remercié le numéro 2 de Canal +, Rodolphe Belmer, un geste interprété comme une reprise en main de la chaîne cryptée.
La survie des "Guignols de l'info" est assurée, a affirmé vendredi à l'AFP Vincent Bolloré. "Il est hors de question de se priver de cet atout qui est la propriété du groupe", a dit l'homme d'affaires breton, à la fois premier actionnaire de Vivendi, maison mère de Canal+, et d'Havas.
Le sort des célèbres marionnettes avait suscité une forte mobilisation sur les réseaux sociaux et dans la classe politique. Jusqu'au président François Hollande qui avait rappelé que "la caricature, ça fait partie du patrimoine".
Vincent Bolloré a toutefois précisé que "les dirigeants de Canal+ et de Vivendi devront décider sous quel format et à quel moment (les Guignols) devront être distribués". Une mise au point qui laisse présager un nouveau format: diffusion en crypté (donc payante), horaire différent ou version raccourcie, voire simple créneau le week-end. Les personnages en latex sont actuellement à l'antenne en clair du lundi au vendredi.
Ce changement de format devrait s'inscrire dans une refonte de la grille de la chaîne. "Le Grand Journal" serait dans le collimateur. Selon Le Point.fr, son sort est même déjà scellé: Maxime Saada, le nouveau directeur général, "devrait annoncer dans les heures à venir () que l'émission ne sera pas reconduite l'année prochaine".
"Le Grand Journal", concurrencé notamment par l'émission de Cyril Hanouna "Touche pas à mon poste" sur D8, a vu son audience s'éroder (6,9% de part d'audience en moyenne la saison dernière contre 6% cette année).
L'audience en clair de Canal+ "a souffert cette saison", note Philippe Bailly, président du cabinet NPA Conseil. "Les Guignols étaient à 8,9% de part d'audience, en moyenne, sur la période 2013-2014, mais en juin dernier, ils sont tombés à 7,3%".
Globalement, "les abonnements en France s'érodent", fortement concurrencés par Netflix pour le cinéma et les séries et par beIN Sports pour le sport, note-t-il.
"La situation de Canal+ en France est un peu difficile", a expliqué Vincent Bolloré à Europe 1. "C'est vrai que la grille du soir en clair pose un problème, parce que cela fait deux ans que l'audience s'érode un peu. Et les émissions coûtent à peu près trois fois plus cher que celles de la concurrence, et la concurrence nous a battu".
- Signal fort -
"Le Grand Journal ne correspond peut-être plus à ce qu?on attend, mais les Guignols, le zapping, le Petit journal ont vocation à perdurer quotidiennement", tempère un syndicaliste.
Si les marionnettes fétiches de la chaîne cryptée ont sauvé leur place, ce n'est pas le cas de Rodolphe Belmer, 45 ans, directeur général depuis octobre 2012, qui été remplacé lors d'un conseil de surveillance par son adjoint Maxime Saada.
Cité de longue date comme un possible successeur de Bertrand Méheut à la présidence de Canal+, Rodolphe Belmer avait vu ses responsabilités élargies en janvier, à la tête de Vivendi Contents.
"C'est bien évidemment une reprise en main", juge un autre syndicaliste, qui souligne que le conseil de surveillance se déroulait pour la première fois à Canal+ et non à Vivendi. "Bolloré s?est affiché très attentif, volontariste, dans une logique très industrielle", a-t-il confié à l'AFP.
Selon un analyste du secteur, qui ne souhaite pas être cité, "c'est une première étape de la prise de pouvoir de Bolloré à Canal+ et de la mise en place d'une nouvelle organisation". "C'est aussi un signal fort lancé à l'équipe dirigeante de la chaîne, soupçonnée d'avoir soufflé sur les braises" dans l'affaire des Guignols.
Pour autant, ajoute-t-il, "je ne suis pas sûr que Vincent Bolloré avait initialement choisi ce moment et ce scénario". "Il y avait des rumeurs sur le départ de Bertrand Méheut et l'arrivée du patron d'Havas Dominique Delport". La priorité de Vincent Bolloré, c'est la "synergie entre Universal (filiale de Vivendi) et Canal+", assure-t-il.
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