Alors que Dominique Cottrez vient de tenter de se remémorer l'enchaînement macabre des infanticides à son domicile, les avocats généraux de la cour d'assises du Nord ont requis à son encontre 18 ans de réclusion criminelle.
Le visage de l'avocat de la défense, Me Frank Berton, reste impassible. Celui de l'accusée est marqué par une grimace de douleur. Elle a du mal à retenir ses larmes. Sa famille vient l'entourer.
La journée a encore été éprouvante pour Mme Cottrez au 5e jour de son procès, jugée pour l'infanticide de huit nouveau-nés, alors que ses souvenirs semblent s'évanouir au fur et à mesure des naissances clandestines.
Assaillie de questions par la présidente -c'est le seul moyen de la faire parler-, Mme Cottrez s'est remémorée les six nourrissons nés après son déménagement dans une nouvelle maison et dont les corps ont été retrouvés au fond d'une cuve, dans le garage.
Les cadavres des deux premiers avaient été retrouvés dans le jardin de l'ancienne maison des parents de Mme Cottrez à Villers-au-Tertre (Nord), le même jour, le 24 juillet 2010.
"J'ai caché jusqu'au bout", se souvient Mme Cottrez, des sanglots dans la voix. Petit à petit, elle dévoile le récit de la troisième naissance.
"Je l'ai attrapé, mis dans une serviette, serré au niveau du cou () j'ai tout mis dans un sachet", raconte Mme Cottrez.
"Vous pleurez?" lui demande la présidente. "Dans la panique, non", répond l'accusée.
Il faut donner des numéros aux bébés tués, pour s'y retrouver dans les souvenirs de Mme Cottrez. Une seule fois, elle a accouché dans son lit. Les autres fois, aux toilettes. Elle décrit les gestes faits ce jour-là, enfin ceux dont elle se rappelle.
La présidente note que le premier accouchement clandestin avait nécessité un grand nettoyage.
"J'étais peut-être plus organisée", acquiesce Mme Cottrez. "Plus ça avançait", commence la présidente. "Plus c'était facile", complète Mme Cottrez.
La voix de l'accusée se brise moins, au fur et à mesure de son récit sur les infanticides. Elle revient sur une éventuelle complicité tacite de son mari.
"J'ai fait ça toute seule, je l'affirme", lance Mme Cottrez, expression limpide qui lui fait parfois défaut. Mais son mari? "Je pense qu'il savait", dit-elle timidement, sans plus de détails. Son père, incriminé dans ses premières déclarations? "J'ai tout inventé."
- 'Une certaine détermination' -
Lundi, Mme Cottrez avait mis un terme à la thèse de l'inceste, qu'elle avait elle-même émise pour expliquer ses gestes.
"L'explication d'inceste nous rassurait, mais nous endormait aussi", lance l'avocat général Eric Vaillant. Comprendre, mais pas excuser, voilà le fil rouge du réquisitoire.
Le parquet a retenu la préméditation pour sept des infanticides, mais, dans le doute, a considéré le premier cas comme un simple meurtre. Des actes "accomplis avec une certaine détermination, pleine conscience, organisation et sang-froid malgré tout", a noté de son côté la magistrate Annelise Cau, qui requérait aux côtés de M. Vaillant.
En introduction, ce dernier avait communiqué pour la première fois les prénoms donnés, récemment par la loi, aux huit nourrissons: Xavier, Hubert, Fleur, Ingrid, Alphonse, Mariette, Blandine, Judith, "une occasion de penser un peu différemment à ces bébés nés, ces bébés assassinés".
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