Les Burundais élisaient lundi leurs députés et conseillers communaux dans un climat de très vives tensions, sur fond de contestation populaire contre le troisième mandat du président Pierre Nkurunziza.
Des violences - jets de grenade et tirs nourris presque toute la nuit - ont parfois retardé le début des opérations de vote à Bujumbura.
La participation, plus que le résultat, est la grande inconnue du scrutin, l'opposition boycottant l'ensemble de ces élections générales, largement condamnées par la communauté internationale.
A la mi-journée, Pierre-Claver Ndayicariye, président d'une Commission électorale accusée d'être aux ordres du pouvoir, assurait que "la participation était massive à travers tout le pays". Mais aucun chiffre officiel n'était disponible et plusieurs bureaux refusaient de communiquer leurs taux de participation.
Cette mobilisation "massive" était même loin d'être évidente à Bujumbura.
Dans les quartiers contestataires mobilisés depuis fin avril contre la candidature de Pierre Nkurunziza à un troisième mandat à la présidentielle du 15 juillet, comme dans le fief présidentiel de Kamenge, les habitants ne se sont pas bousculés lundi matin. Insécurité, manifestants barrant la route aux électeurs ou respect du boycott, les raisons étaient multiples.
Quelque 3,8 millions d'électeurs, selon les autorités, sont appelés aux urnes pour ce scrutin proportionnel à un tour. Ils doivent élire 100 députés, auxquels s'ajouteront trois membres de l'ethnie ultra-minoritaire twa ainsi que, si nécessaire, un nombre variable de députés cooptés au sein des listes en lice pour parvenir aux équilibres prévus par la Constitution : l'Assemblée doit compter 60% de députés hutu (environ 85% de la population), 40% de députés tutsi (environ 15%) et 30% de femmes.
Ces équilibres ont été consacrés par l'Accord d'Arusha qui avait conduit à la fin de la guerre civile ayant opposé entre 1993 et 2006 l'armée, alors dominée par l'élite tutsi, et des rébellions hutu. Ils ont apporté dix ans de paix au Burundi, pays à l'histoire post-coloniale ponctuée de massacres.
Signe du climat toujours tendu lundi, une grenade a explosé sans faire de victime peu avant 09h00 (07h00 GMT) dans le quartier contestataire de Musaga, à Bujumbura, à quelques centaines de mètres d'un centre de vote près duquel de nombreux policiers patrouillaient.
Militaires et policiers surtout y faisaient la queue pour voter. "Les manifestants ont fermé les routes pour nous bloquer, mais nous sommes allés chercher des policiers pour nous accompagner", a raconté Annick Niyonkuru, l'une des rares personnes civiles à attendre avec eux.
Plus au nord en territoire présidentiel, dans un centre de vote de Kamenge lui aussi sous étroit contrôle policier, de petits groupes d'une dizaine de personnes attendaient devant les bureaux de vote.
"Je remarque que l'affluence est faible par rapport à 2010", date des dernières législatives, a remarqué Salima Mundanikure, une évangéliste d'une cinquantaine d'années.
Le centre de Bujumbura avait lui des airs de ville fantôme: les magasins étaient fermés, la circulation clairsemée. Une bonne partie de la population est partie se réfugier en province ou au Rwanda voisin de crainte d'une attaque de grande ampleur à l'approche des scrutins.
- Défections -
En province, où s'est rendu un journaliste de l'AFP, le centre de vote de la commune de Bururi, dans la province éponyme (sud), résolument anti-Nkurunziza, affichait une participation d'environ 10% à la mi-journée. Plus aucun électeur n'y attendait alors de voter.
A Rumonge, politiquement plus mixte, plusieurs dizaines de votants faisaient la queue en début de matinée. A la mi-journée dans la commune même de Rumonge, la participation était d'environ 30%.
Malgré le boycott, l'insécurité et les appels de la communauté internationale à reporter les scrutins, le gouvernement a tenu à maintenir lundi les élections, arguant d'un risque de vide institutionnel, le mandat de Pierre Nkurunziza s'achevant le 26 août.
Signe de l'isolement croissant du camp présidentiel, le président de l'Assemblée nationale sortante Pie Ntavyohanyuma, deuxième personnage de l?État et membre du parti présidentiel CNDD-FDD ouvertement opposé au troisième mandat, a annoncé sa défection dimanche depuis Bruxelles.
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